dimanche 20 août 2017

Colombie. Un budget qui n'est pas pour la Paix


Les recettes budgétaires de l'OCDE

Source Semanario VOZ

Le Gouvernement colombien a présenté ces jours derniers le Budget Général de la Nation pour 2018. Le projet de loi représente 235.6 mille milliards de pesos (soit 67 milliards d'euros), il doit être approuvé avant le mois d'octobre et sera débattu dans les commissions économiques conjointes et dans les plénières des deux chambres. Le budget présenté correspond aux demandes des organisations internationales du commerce et aux orientations et projections fiscales tracées par le gouvernement au cours de la première année du mandat du président Juan Manuel Santos. C'est un budget qui tourne le dos à la réalité sociale et politique du pays. Et particulièrement aux besoins liés à la mise en oeuvre de l'accord de paix pour l'année prochaine, et tout le quinquennat au cours duquel seront développés les accords de paix signés entre les FARC-EP et l'Etat colombien.

La Défense

Si le budget général pour 2018 n'avait pas à préciser de lignes budgétaires spécifiques pour les programmes, les plans et les stratégies de développement concernant la mise en oeuvre des accords, il aurait dû contenir une augmentation importante de chaque rubrique sociale ou d'investissement lié à la paix. Et pourtant, il n'y a qu'un seul secteur qui augmente, c'est celui de la Défense.

Il est préoccupant que les rubriques de la Défense augmentent alors que les rubriques liées à l'investissement social diminuent. Par exemple : La Défense aurait 4 mille milliards (1.140 M€) de plus que le budget 2017. Ce secteur est passé de 29 mille milliards de pesos (8.263 M €) à 32.4 (9.229 M €) en 2018. Alors que le pays passe de la guerre à la paix et qu'il n'a plus besoin de grands mouvements de troupe ni d'opérations militaires gigantesques, les chefs militaires continuent à bénéficier d'un budget énorme et ont la capacité de faire des contrats sans aucune régulation, puisqu'une bonne partie de leurs dépenses sont sous réserve.

Le Centre Démocratique (parti d'Alvaro Uribe Vélez) a d'ores et déjà annoncé que son groupe parlementaire ne votera aucune rubrique destinée à la réincorporation des ex-combattants, au développement social des communautés affectées par le conflit ou aux plans d'organisation territoriale qui aient quelque chose à voir avec l'agenda de La Havane. Bien que la réincorporation sociale des ex-combattants des FARC ne coûte au pays qu'une somme dérisoire, équivalente à sept jours d'exécution du budget militaire en pleine guerre.

L'affectation budgétaire

Les Programmes de Développement dans une Approche Territoriale (PDETS) sont une des autres stratégies pour la consolidation de la paix qui apparaissent dans le budget de l'année prochaine, ils seront le moteur de la mise en route des accords de paix dans les territoires. Pourtant, alors que l'on attend que le Conseil National de la Politique Economique et Sociale (CONPES) formule un document qui intègre les ressources nécessaires pour les cinq ans à venir, il n'y a pas de renforcement des entités déterminantes pour cet objectif. Bien au contraire, les entités départementales de planification et de développement social vont être sérieusement affectées dans les montants mandatés par les ministères.

Un autre secteur sinistré par les coupes budgétaires est celui de la science et de la technologie. Il est passé de 380 (108 M €) en 2017 à 222 mille milliards (63 M €) pour 2018. Cette diminution affecte la recherche, le maintien des centres scientifiques colombiens, le budget des universités publiques, les bourses accordées aux scientifiques colombiens en Colombie et à l'étranger.

Education

Le budget de l'éducation se maintient avec 35 394 mille milliards de pesos (10,08 M €) alors que l'on s'attendait à ce qu'il augmente. En effet, le pays vient d'être le témoin d'une énorme mobilisation des enseignants qui avaient obtenu du Gouvernement des engagements basés sur la croissance du budget annuel à partir de 2018 jusqu'en 2022 afin d'obtenir une augmentation des salaires, une hausse de l'investissement dans l'infrastructure scolaire et une mise à jour de la journée unique du système éducatif qui aurait dû être insérée dans le budget 2018.

Conformément à ce qui a été signé par la Ministre de l'Education Yaneth Giha, "le Gouvernement colombien et la Fecode (Fédération Syndicale des Enseignants) ont accordé qu''à partir de 2018, les enseignants recevront une bonification salariale pédagogique de la manière suivante : En 2018, les enseignants recevront une augmentation correspondant à 6% du traitement mensuel de base ; en 2019, les enseignants recevront une augmentation correspondant à 11% du traitement mensuel de base. Et à partir de 2020, les enseignant recevront une augmentation correspondant à 15% du traitement mensuel de base". Sur la base d'un budget équivalent pour la Justice en 2017, il ne semble pas possible que cet accord soit respecté par l'exécutif.

Sport

Dans le cas du sport, la réduction du budget atteint 347 mille millions de pesos (98 M €). Alors que cette année, le Comité Olympique Colombien, la plus grande autorité du Sport national, avait un budget de 530 mille millions (151 M €), en 2018, il aura 183 mille millions de pesos (52 M €) pour son fonctionnement, le développement des pépinières de talents sportifs, le soutien aux athlètes de haut niveau et à la préparation du cycle olympique.

Le dernier cycle olympique a été le plus réussi de l'histoire du sport colombien. Trois médailles d'or, deux d'argent, trois de bronze et 13 diplômes. Alors que le budget pour 2017 et les années antérieures avaient été idéales pour la préparation de nos sportifs, il va sans dire que les temps de préparation des sportifs de haut niveau vont être sérieusement affectés.

A ce propos, Baltazar Medina, le Président du Comité Olympique Colombien, a fortement critiqué le Ministre des Finances, Mauricio Cárdenas : " Il est très clair que le budget est insuffisant pour le sport colombien mais, au delà, il ne correspond absolument pas aux résultats, au développement et à la reconnaissance internationale de notre pays dans le champ du sport. Il est absurde de penser que tous ces résultats et tous ces succès peuvent se maintenir et se répéter avec un budget totalement insuffisant" a indiqué le dirigeant sportif.

52 mille milliards de pesos sont destinés au service du paiement de la dette soit 1 billion de plus que l'année dernière, sachant que c'est la rubrique la plus importante du budget. Selon les données fournies par le Banco de la República au 1er trimestre de 2017, la dette colombienne s'est élevée à 122.412 millions de dollars, avec une croissance annuelle de 6.7%.

Les mesures austéritaires du budget sont dues aux recommandations de l'OCDE (Organisation pour la Coopération et le Développement Economique) qui, au cours de sa dernière visite dans le pays, a signalé la nécessité de mener à bien en 2018 les réformes des systèmes de retraite qui puissent réduire la dépense de l'Etat et consolider la politique fiscale à moyen et long terme, au détriment de l'investissement social du pays.






mardi 15 août 2017

Déclaration de Jean Arnault, chef de la mission des Nations Unies en Colombie


Source : Mission ONU Colombie

Pondores, La Guajira. 15 Août 2017
J'ai le plaisir de vous informer sur le bilan des opérations et activités liées au dépôt des Armes :

Enlèvement des containers
Aujourd'hui 15 août, se termine le processus d'extraction de la totalité de l'armement et des restes de munitions présents dans les 26 campements des FARC-EP ainsi que ce qui a été retrouvé dans les caches à la date d'aujourd'hui. En plus de l'opération qui est en cours à Pondores, des opérations d'extraction sont en cours d'exécution dans quatre zones en ce moment : La Reforma, Yari, La Guajira et La Variante. Le matériel transporté dans les containers comprend 8.112 armes et près de 1.300.000 cartouches incinérées. 

Je souligne que le processus d'extraction comprend 16 mouvements aéro-terrestres et 10 terrestres, ce qui représente plus de 50 heures de vol des 3 hélicoptères de la Mission et plus de 11.000 km parcourus.

Au jour d'aujourd'hui se termine aussi la destruction de tout le matériel instable qui se trouvait dans les 26 campements comprenant des mines antipersonnel, des grenades, des explosifs artisanaux, de la poudre, entre autres.

Opérations dans les caches d'armes
En ce qui concerne les opérations dans les caches, on dispose à la date d'aujourd'hui d'une information sur 873 caches dont le matériel a été récupéré dans 510 caches.

Jusqu'à maintenant, concernant le résultat des opérations d'extraction des caches d'armes, la Mission de l'ONU sur le terrain a comptabilisé le matériel suivant :
  • 795 armes
  • 293 803 munitions de différents calibres pour des armes légères
  • 22 077 kilogrammes d'explosifs divers
  • 25 216 mètres de cordon de détonation et de mèche lente
  • 3 957 grenades (de main et de 40 mm)
  • 1 846 mines antipersonnel
  • 27 282 détonateurs
  • 1 130 munitions de mortier ( parmi lesquels sont identifiés du 81 mm, 60 mm et des roquettes.
Il me semble que c'est un chiffre important, qui démontre que définitivement, il y a eu un processus exhaustif de dépôt des armes, pas seulement un processus de dépôt des armes individuelles, mais un processus exhaustif de tout ce que contiennent les équipements des FARC-EP. Et comme l'a dit le président Juan Manuel Santos, cela met le pays sur la voie d'une nouvelle étape.
Merci beaucoup.



Déplacement des containers de Nations Unies dans le Tolima



Colombie : La pauvreté et les inégalités doivent disparaître dans un pays en paix.

Traduction spot FARC-EP
  • En Colombie actuellement, 13 millions de personnes vivent dans la pauvreté*
  • 4 millions vivent dans une pauvreté extrême.
  • Environ 8 millions de personnes vivent dans une pauvreté multidimensionnelle, avec des problèmes de logement, de travail, de santé et d'accès aux services de bases. 
  • La Colombie est le 2ème pays avec le plus grand taux d'inégalité sociale en Amérique Latine
Maintenant, avec la Paix et avec le pouvoir de notre parole, nous FARC-EP, allons lutter pour construire un pays avec une distribution plus juste de la richesse pour que toutes et tous, nous puissions vivre dignement.

FARC-EP
Paix avec Justice Sociale


* Pour une population totale de 49 millions d'habitants.



Dilma Rousseff : L'image diffusée en Occident sur le Venezuela est irresponsable


Source BBC Mundo

Il y a près d'un an que la procédure d'impeachment contre la présidente du Brésil Dilma Rousseff, l'a obligée à laisser son poste alors qu'elle était accusée de manipuler illégalement les comptes du gouvernement. Mais ce n'est pas une raison pour qu'elle garde le silence.

Au cours d'un entretien avec la BBC, l'ancienne cheffe d'Etat a affirmé que l'image diffusée en Occident sur le Venezuela est irresponsable, que le traitement de la presse internationale sur ce pays est "absurde" et que de cette manière, un grand conflit armé peut se créer dans la région "comme ils l'ont fait en Irak et en Afghanistan".

Depuis que Rousseff a quitté le pouvoir, son mentor politique, l'ancien président Luz Inácio Lula da Silva, a été condamné il y a un mois à 10 ans de prison pour un autre cas de corruption et de blanchiment d'argent. Quelques semaines auparavant, Michel Temer qui a succédé à Roussef à la présidence du Brésil et qu'elle accuse de "traître", a failli être poursuivi par la Chambre des Députés.

Avec ce paysage, l'ancienne présidente a décidé de parler avec la correspondante de la BBC au Brésil, Katy Watson, pas seulement sur la situation politique turbulente chez elle mais aussi sur celle du pays voisin et ancien allié politique : le Venezuela de Nicolás Maduro.

L'Occident est irresponsable avec le Venezuela

Au milieu de la crise actuelle au Venezuela qui a laissé plus de 100 morts dans les rues au cours des derniers quatre mois de protestation contre le gouvernement, Gleisi Hoffmann, le leader du Parti des Travailleurs (PT) auquel appartiennent Rousseff et Lula, a souligné que le parti soutenait Maduro contre la "violence offensive de la droite". Lula avait également montré son soutien au gouvernement socialiste auparavant, et Rousseff n'est pas catégorique sur la condamnation du gouvernement du Venezuela, comme l'ont été d'autres leaders de la région ces dernières semaines.

"Maduro gouverne au Venezuela dans des circonstances extrêmes. Ce dont nous avons besoin, c'est d'une manière d'aller de l'avant sans effusion de sang" dit-elle. Elle admet pourtant que Maduro n'a pas la même stature politique qu'Hugo Chávez. "Je crois qu'Hugo Chávez a été un grand leader qui a eu la chance d'être au pouvoir à l'époque où les prix du pétrole étaient à la hausse" a dit Rousseff à la BBC. "Quand les prix ont commencé à descendre, il n'y a pas eu que le Venezuela à le sentir. Et la situation a commencé à devenir très difficile" ajoute l'ex-présidente.

A ce propos, Rousseff critique l'image véhiculée en Occident sur le pays, qu'elle qualifie d' "irresponsable" et considère également que le traitement de la presse internationale "est absurde". "Ils vont créer, comme ils l'ont fait en Irak et en Afghanistan, ils peuvent créer ici, après 140 années de paix, ils peuvent créer un grand conflit armé" assure-t-elle. Et elle ajoute : "Et il ne s'agit plus de discuter. Car l'opposition n'est pas parfaite non plus".

Vous souvenez-vous de Saddam Hussein ?

Et donc on ne peut pas reprocher à Maduro la crise actuelle au Venezuela ? Lui demande la journaliste de la BBC.

"Je ne vais pas en vouloir uniquement à Maduro. Ce qu'il y a c'est un conflit" souligne Rousseff. "Vous vous souvenez de ce qu'ils ont fait à Saddam Hussein ? Ils l'ont tué de la manière la plus brutale possible. Quand ils l'ont fait, tous les monstres sont sortis à découvert, on a ouvert une boite de Pandore. D'où est sorti l'Etat Islamique? Il est venu du fait que les Etats-Unis pensaient qu'il y avait une position démocratique là-bas. Et il n'en était pas ainsi" ajoute-t-elle.

Le 5 août dernier, le bloc économique des pays sudaméricains, le Mercosur, a suspendu indéfiniment le Venezuela jusqu'à ce que la démocratie soit rétablie dans le pays. Pour Roussef, la communauté internationale, et particulièrement le Brésil, a beaucoup de comptes à rendre.

"Le Brésil n'a pas le droit de parler sur la clause démocratique au Mercosur. La situation au Brésil n'est pas la même que celle du Venezuela mais il y a bien eu un coup d'Etat. Au moins, au Venezuela, ils sont arrivés au pouvoir à travers le vote" a souligné Rousseff.

Un coup d'état en cours

Le 31 août 2016, le Sénat du Brésil a destitué Rousseff de son poste de présidente pour "maniements illégaux des comptes du gouvernement". Pour Rousseff, cet événement n'a été qu'une des phases d'un processus bien plus long. "Ne croyez pas que ça a commencé et fini le jour où ils m'ont sortie de mon bureau. Ca a commencé le jour où eux (les rivaux politiques) se sont rendus compte qu'ils n'allaient pas arriver au pouvoir par des élections démocratiques. C'est à dire que la démocratie n'était pas viable selon leur point de vue" a-t-elle dit à la BBC.

Pour Rousseff, la condamnation de son prédécesseur, l'ex-président Lula da Silva, est un autre mouvement de ce plan de manoeuvres politiques. Au delà de la sentence de 10 ans de prison contre lui, Lula se profile comme candidat du PT et se maintient dans les sondages pour les élections de l'année prochaine. "Le premier chapitre a été un coup d'Etat contre moi. Mais il y a un deuxième chapitre, qui est d'éviter que Lula devienne candidat présidentiel".

Mais n'est-il pas temps que la scène politique du Brésil reçoive du sang neuf ?

"Comment savoir si le Brésil a besoin d'un nouveau leader et d'un nouveau changement ? Depuis quand ce qui est "nouveau" est nécessairement "bon" ? Le nouveau, ça pourrait être Hitler. Il n'y a pas de garanties. Pourquoi les gens reconnaissent ce que Lula a fait ? Parce que pendant son gouvernement, on vivait mieux" affirme-t-elle. 

Sa réponse est claire quand on lui demande si le fait qu'elle soit une femme a influé sur sa destitution: "Vous me demandez s'il y a eu un comportement machiste ou misogyne ? Oui. Cela n'a pas été la raison principale, je ne peux pas dire ça, mais oui, c'est un élément qui s'est lié à tous les autres".




lundi 14 août 2017

Colombie. Défendre l'approche genrée

@Gustavo Torrijos. Colombia 2020

Par Renata Cabrales

"Bien sur, cela sera très difficile que ces instances représentent toutes les femmes, mais c'est une victoire que l'instance soit là, comme garantie de l'approche genrée dans les accords de paix".

Au cours de sa dernière visite en Colombie, Lorena Peña, la présidente de la FDIM (Fédération Démocratique Internationale des Femmes) a souligné que la mise en oeuvre des accords de paix était une de leurs priorités et que, pour la Fédération des Femmes, il est très important que les conditions de vie et les droits des femmes soient dûment soulignés dans chaque point des accords. Il importe qu'ils ne soient pas généralisés, aussi bien dans les programmes de réinsertion à la vie civile que dans les programmes de distribution des terres ou dans ceux sur la participation politique. Elle a par ailleurs affirmé qu'il y a un axe thématique qui est celui sur les femmes victimes de violence sexuelle pendant la guerre.

Afin d'assurer un suivi de la mise en oeuvre des accords de paix, une délégation du Forum de Sao Paulo a visité la Zone de regroupement des FARC "Mariana Paéz" à Mesetas. La situation des femmes enceintes y a été examinée de près et la délégation est arrivée à la conclusion que le gouvernement ne fait pas son devoir envers ces femmes puisqu'il ne répond pas à leurs besoins de mères et aux besoins basiques de leurs enfants.

Pour que l'approche genrée soit respectée dans les accords de paix, la CSIVI (Commission de Suivi, d'Initiative, de Vérification et d'Implémentation du processus de paix) a lancé un appel à candidatures afin d'élargir l'Instance Spéciale chargée de garantir l'approche genrée dans la mise en oeuvre de l'Accord Final entre le Gouvernement et les FARC. Environ 830 organisations de défense des droits humains des femmes ont répondu à l'appel. Il y a eu des assemblées régionales et des candidatures nationales. La tâche de la CSIVI n'a pas été facile car il ne fallait sélectionner que six candidatures alors qu'elle avait reçu un nombre important de profils excellents. "En fait, il y a très peu de femmes pour représenter toutes les femmes du pays et toutes les organisations... Bien sur, cela sera très difficile que ces instances représentent toutes les femmes, mais c'est une victoire que l'instance soit là, comme garantie de l'approche genrée dans les accords de paix" affirme Magda Alberto, membre de Mujeres por la Paz (Femmes pour la Paix), élue pour faire partie de l'Instance.

Dans une conversation avec VOZ, Magda Alberto nous parle du rôle de suivi de l'approche genrée de la Haute Instance.

Pour la CSIVI, quelles sont les fonctions de la Haute Instance ?

Le communiqué n°18 de la CSIVI a lancé l'appel à candidatures pour former l'Instance et a détaillé quelles sont ses fonctions : Présenter des rapports, suggérer des orientations et faire des recommandations à la CSIVI afin de garantir l'approche genrée dans le cadre de la mise en oeuvre des accords, ainsi que faire le suivi de l'approche de genre dans les plans-cadre. Il s'agit d'entretenir des canaux de communication avec les femmes, c'est un des défis les plus importants : Que nous ne soyons que sept et que nous maintenions pourtant un dialogue permanent avec les femmes. En tant que représentantes, il faut que nous soyons les porte-paroles des femmes dans les territoires et que nous écoutions leurs besoins et leurs propositions pour que les droits de toutes les femmes deviennent une réalité dans la mise en oeuvre des accords.

Pourquoi un suivi de l'approche genrée est-il nécessaire ? Existe-t-il un danger que cela ne soit pas respecté ?

Pendant la campagne électorale du référendum où le Non a gagné, un des arguments de ceux qui étaient contre la paix, était le thème des droits des femmes et de la population LGTBI. Ils ont affirmé qu'ils évinceraient des accords la population LGTBI et les femmes. C'est pourquoi nous avons fait une campagne qui disait "On ne nous vire pas des accords" (#DelAcuerdoNoNosSacan). Suite à la négociation qui a eu lieu après le Non, on a réussi à ce que reste dans l'accord pour garantir l'approche genrée une instance spéciale formée par 6 représentantes des organisations de femmes colombiennes nationales et internationales qui auraient un dialogue permanent avec la CSIVI. Et on y est arrivé dans le cadre de l'accord, après le Non. Tout cela pour que soient garantis les droits des femmes et de la population LGTBI dans la mise en oeuvre, et que cela n'aille pas se perdre dans l'accord final. C'est la raison pour laquelle, cette année, la CSIVI a lancé l'appel à candidatures en vue de la participation des différentes organisations. Pour cette élection, il a été décidé qu'il n'y aurait pas que six élues mais qu'il y aurait aussi une représentante de la population LGTBI. Il y a donc trois candidatures territoriales, une territoriale en représentation des victimes et deux représentantes des organisations nationales.

Comment a eu lieu l'élection ?

Dans ce processus, l'élection n'a pas été facile, il y a eu de longues discussions de la CSIVI pour se mettre d'accord sur qui pouvait être les meilleures représentantes. Je crois que finalement, on est arrivé à une diversité des voix, avec une présence de celles qui ne sont pas traditionnellement dans ce genre d'espaces, et qui portons les positions revendicatives des femmes populaires, des comités de base, des indigènes, des paysannes, des jeunes femmes dans les territoires, des victimes. Il faut dire que, lamentablement, il n'y a pas de femme afro-descendante dans cette instance et que les femmes afros sont désolées, ou tout au moins, surprises de ne pas être présentes dans l'instance. Mais nous l'avons déjà dit, c'est un espace très réduit et c'était très difficile que nous nous sentions toutes représentées. L'important maintenant, c'est de faire un travail en commun pour établir le dialogue avec elles et avec beaucoup d'autres femmes qui n'ont pas réussi à être là. Parce que finalement, nous avons été 830 organisations à nous présenter, c'est à dire que nous étions 830 femmes à vouloir y être : L'important, c'est de pouvoir dialoguer avec les femmes et de porter leurs voix dans cette instance.

Qui sont les élues ?

Les femmes élues viennent d'organisations populaires, organisations de base, indigènes, territoriales, de victimes. Elles vont porter des voix de femmes qui ont été historiquement exclues, violentées, exploitées. Cela fait partie de l'élargissement démocratique que le pays en train de vivre et c'est l'échantillon d'une instance dans laquelle nous les femmes, avons des voix et une représentation propre, des voix de femmes qui sont là maintenant, depuis les territoires, depuis le travail sur le terrain, alors qu'elles n'avaient jamais été présentes dans ce genre d'espace.

C'est un vrai défi pour nous qui serons là, le défi de veiller à ce que les accords se mettent en oeuvre. Il s'agit là d'une tâche très intéressante et le défi c'est de réussir l'articulation avec les femmes. Il ne faut pas faire une représentation entre nous mais une représentation liée aux femmes des territoires, en pensant que c'est une paix territoriale et qu'elle doit inclure les territoires de manière réelle.

Les femmes élues sont :
Marcela Sánchez, directrice de Colombia Diversa; Mayerlis Angarita de Narrar para Vivir (Raconter pour Vivre) ; Victoria Neuta, de la Commission des Femmes Indigènes; Magda Alberto de Mujeres por la Paz (Femmes pour la Paix) ; et dans les organisations territoriales : Rocío Pineda (Antioquia), Francisca Aidee Castillo (Association de Femmes Travailleuses de l'Arauca) y Yuly Artunduaga, de Mujeres Andinoamazónicas (Putumayo).

Source : Semanario VOZ





dimanche 13 août 2017

Face à la menace d'intervention militaire des Etats-Unis au Venezuela


Les Pays d'Amérique Latine rejettent la menace d'intervention militaire 

Source : Correo del Orinoco

Suite à la menace d'intervention militaire émise ce vendredi par le président des Etats-Unis Donald Trump contre la République Bolivarienne du Venezuela, plusieurs pays de la région ont exprimé catégoriquement leur rejet concernant des actions de ce type.

Le premier pays à se prononcer a été le Chili, à travers son ministre des affaires étrangères Heraldo Muñoz, qui a indiqué que le gouvernement de Michelle Bachelet "rejette la menace d'une intervention militaire au Venezuela".

De la même manière, le président bolivien Evo Morales a condamné la "volonté interventionniste armée des Etats-Unis contre le Venezuela, pays qui cherche la paix en dialogue par la Constituante et des élections régionales". Morales a assuré qu'avec cette tentative d'intimidation, Trump révèle réellement ses intentions concernant la Patrie de Bolívar et confesse au monde que "ceux qui sont contre Maduro, ne recherchent qu'une intervention militaire impérialiste", c'est pourquoi ils gardent "un bruyant silence complice".

Pour sa part, le gouvernement colombien a publié ce samedi un communiqué rejetant les mesures militaires et l'usage de la force dans le système international contre le peuple vénézuélien, affirmant que "toutes les mesures doivent s'appliquer dans le respect de la souveraineté du Venezuela à travers des solutions pacifiques".

Le chancellier péruvien Ricardo Luna, au cours d'un entretien avec l'agence Reuters, a qualifié comme "un acte de folie" la menace du gouvernement des Etats-Unis contre le peuple vénézuélien et a souligné que "toutes les menaces étrangères ou internes de recours à la force portent atteinte (...) aux principes de la Charte des Nations Unies", c'est la raison pour laquelle "le Pérou et certains pays de la région qui ont la même mentalité, condamnent la menace ou l'usage de la force non approuvé".

A ce propos, les pays qui sont membres du Mercosur (Marché Commun du Sud) ont considéré que "les uniques instruments acceptables pour la promotion de la démocratie sont le dialogue et la diplomatie", rejetant ainsi la violence et tout type de stratégie qui implique l'usage de la force.

Le Mexique, à travers la Secrétaire aux Affaires Etrangères, a exprimé son rejet "de l'usage ou de la menace d'usage de la force dans les relations internationales, et affirme que la crise au Venezuela ne peut pas se résoudre à travers des actions militaires, internes ou externes". Certaines organisations sociales mexicaines citées par l'Agence Vénézuélienne de Nouvelles (AVN) se sont opposées à la possibilité d'intervention militaire des Etats-Unis au Venezuela car selon elles, "l'attitude du gouvernement des Etats-Unis n'est rien d'autre qu'une nouvelle tentative d'appropriation des territoires et d'implantation d'un gouvernement de spoliation, misère et inégalité" comme il l'a fait récemment en Lybie et en Irak.

Traduction : CM





samedi 12 août 2017

Venezuela : Installation de l'Assemblée Constituante. 4 août 2017


Discours de Delcy Rodriguez, Présidente de l'Assemblée Nationale Constituante de la République Bolivarienne du Venezuela

Caracas, 4 août 2017

Vous, hommes et femmes de la Constituante qui avez été élus par la volonté populaire absolue d'un peuple qui a traversé les montagnes, qui a franchi les remous du fleuve, bondi et dépassé les barrières du fascisme et de la violence pour venir s'exprimer en tant que pouvoir constituant originaire : Jurez-vous au nom de ce peuple qui vous a donné sa volonté absolue de peuple originaire, son pouvoir constituant souverain et plénipotentiaire ? Jurez-vous de défendre la patrie face aux agressions impériales qui fondent aujourd'hui sur notre Venezuela, contre les agressions de la droite fasciste qui a déployé toute sa haine, toute son intolérance pour vaincre le peuple indomptable du Venezuela ? Jurez-vous de défendre le Venezuela avec courage, de le défendre avec cette bravoure du peuple vénézuélien ?

S'il en est ainsi, que la patrie vous en soit reconnaissante à vous tous, hommes et femmes.

Je veux remercier le constituant Fernando Soto Rojas, le constituant Elvis Amoroso et Victor Clark, pour leur contribution à l'installation de cette assemblée plénipotentiaire et souveraine. L'Assemblée Nationale Constituante est donc formellement installée, elle a été convoquée par le chef d'Etat Nicolás Maduro Moros et ratifiée par la volonté absolue de plus de 8 millions de vénézuéliens et vénézuéliennes.

Chers constituants souverains et plénipotentiaires, nous sommes arrivés ici avec le portrait de notre père fondateur et libérateur Simón Bolívar, et de notre commandant éternel, Hugo Chávez. Nous sommes 8 millions à être venus, peuple originaire constitué. Je veux, s'il vous plait, que vous vous leviez pour remercier celui qui a convoqué cette constituante : le Président Nicolás Maduro est devenu un géant aujourd'hui, le président Nicolás Maduro s'est élevé au dessus de lui-même et a remis le pouvoir au peuple, il en sera fait mémoire dans les pages glorieuses de notre histoire, c'est ainsi qu'on le reconnaîtra. Nous remercions le "président-peuple", le président Maduro, pour avoir activé les pouvoirs créateurs et sages du Venezuela.

Le 5 août 1999, notre commandant éternel Hugo Chávez faisait un discours à la plénipotentiaire de 1999 et disait en citant un dramaturge anglais : "Souffle la tempête, souffle le vent fort, j'ai de quoi faire face". Le commandant Hugo Chávez ne se trompait pas et il s'est adressé au peuple du Venezuela. Il y avait une tempête provoquée par le modèle néolibéral imposé par la bourgeoisie locale, avec ses alliés impérialistes, il y avait une profonde crise politique, sociale, économique, culturelle au Venezuela. Et le commandant Hugo Chávez est apparu comme un rayon de lumière pour notre patrie et il a accouché d'une constituante. A l'époque, la même bourgeoisie qui aujourd'hui a prétendu s'opposer à l'activation du pouvoir constituant originaire, avait forgé des combines juridiques pour que le pouvoir originaire ne soit pas activé. Les lire, c'est comme écouter ceux qui tentent aujourd'hui de réprimer la voix du peuple. Mais c'est totalement impossible, il n'y a pas moyen de faire taire le peuple du Venezuela, il n'y a pas moyen de détenir le peuple souverain du Venezuela.

A la constituante de 1999, nous étions arrivé avec cette tempête, les vents forts soufflaient, mais notre commandant a été sage et il a dit : "Souffle la tempête, souffle le vent fort, j'ai de quoi faire face". Et le Commandant Chávez n'était pas en train de se vanter vainement, le Commandant Chávez savait qu'il parlait au nom de millions de vénézuéliens et vénézuéliennes qui s'étaient levés et avaient rompu les chaines de la domination imposées par une minorité bourgeoise, apatride, toujours liée aux pouvoirs impérialistes et contraire à un projet national au Venezuela. Cette tempête a accouché d'un modèle unique au monde, un modèle exclusif à arborer, un modèle d'inclusion sociale. Pour la première fois depuis son processus d'indépendance, le peuple du Venezuela a été reconnu dans ses pouvoirs créateurs et dans sa grandeur, reconnu en tant qu'être humain à travers l'égalité. Avec le commandant Chávez, avec la constituante de 1999, nous avions rompu les chaines de la domination, de l'esclavage et nous avions, comme nous le faisons aujourd'hui, donné au monde un message de libération nationale.  Avec le commandant Chávez et le modèle de 99, la démocratie participative et protagonique du peuple du Venezuela est arrivée et aujourd'hui, nous approfondissons ce modèle. Elle est arrivée avec cette constituante de 99, de nouveaux airs ont soufflé sur notre patrie et nous avons vu alors, depuis 1999, un peuple qui construit son propre destin, un peuple qui décide de son avenir, de son futur, sans aucun type de pouvoir supérieur qui lui donne des ordres ou des instructions.

Mais pendant que le peuple avançait, tel un ouragan comme le disait le commandant Hugo Chávez, ou telle cette marée rouge qui sillonnait toutes les rues de notre patrie, avec ce peuple aussi s'est préparée une conspiration sans mesures contre le modèle porté par la constitution de 1999. Ces élites qui avaient été vaincues, ce modèle source d'inégalité, de pauvreté, de faim, de discrimination, de destruction de la planète, ce modèle a cherché à renverser la constitution de 1999. Sans aucune trêve camarades, depuis 1999, il y a eu un processus de contradiction historique qui s'exprime aujourd'hui avec une intensité majeure dans la constituante de 2017. C'est la droite fasciste - car il faut le dire : quand ils ont été au gouvernement, ils ont exercé un terrorisme d'état.

Je veux rendre hommage à nos cadres : avec notre Bolívar, avec notre commandant éternel, il y a aussi Víctor Soto Rojas, Argimiro Gabaldón, Fabricio Ojeda, le jeune Jorge Rodríguez, le jeune Roberth Serra, notre soldat éternel Eliezer Otaiza. Nous sommes des millions à être entrés dans cette assemblée, comme seuls se réveillent les peuples quand ils sont décidés à être libres. En 1999, il y a donc eu un processus d'émancipation de la misère économique et de l'exclusion politique qui est resté formulé dans notre constitution mère de 1999. Si nous sommes venus ici, ce n'est pas pour détruire notre constitution, non, nous sommes venus écarter de notre chemin tous les obstacles, tout l'arbitraire dictatorial qui nous a empêché d'exercer la validité matérielle de notre constitution, nous sommes venus la défendre, nous venons l'approfondir, nous venons la renouveler, camarades.

C'est de cette constitution de 1999 qu'est née cette Assemblée Nationale Constituante, camarades, grâce au commandant Chávez, grâce à notre constitution mère et grâce, comme nous le disions au début, à notre président-peuple qui est devenu aujourd'hui un géant, avec plus de peuple et des millions de vénézuéliennes et vénézuéliens. Cette Assemblée Nationale Constituante ne sort pas de rien, camarades, cette Assemblée Nationale Constituante a affronté toute une série d'obstacles et d'atrocités de la part de ceux qui résistent à la démocratie, de ceux qui prétendent restaurer les chaines impérialistes rompues par notre processus d'indépendance, de ceux qui ne reconnaissent pas l'être humain comme un égal mais comme quelqu'un qu'il faut soumettre dans une relation d'inégalité violente. Cette Assemblée Nationale Constituante a pu rompre la phase la plus obscure de la dictature qui, à droite, cherchait à empêcher l'exercice massif des vénézuéliens et vénézuéliennes mobilisés pour exercer notre droit au vote, pour exercer notre droit à la libre circulation, le droit à la santé, au travail, à la vie.

Nous n'arrivons pas ici en partant de rien, le peuple qui est là est en lutte, debout, il a le moral, il a une éthique combative. Cette constituante est née d'un profond conflit historique avec un groupe minoritaire qui prétend prendre possession de la patrie, un groupe minoritaire qui prétend la restauration néolibérale coûte que coûte. Nous avons vu d'horribles crimes de haine, nous avons vu comment ils brûlaient des êtres humains vivants, des atrocités inhumaines, nous avons vu aussi la violence criminelle à des fins politiques pour déstabiliser et renverser le gouvernement constitutionnel et légitime du président Nicolás Maduro, de ceux qui louent le vieux style des dictatures, je répète, cette droite, contre-révolutionnaire, fasciste, qui aujourd'hui prétend renverser le processus révolutionnaire que s'est donné le peuple du Venezuela en 1999, quand ils ont été au gouvernement, ils n'ont pas été différents, ils ont été plus fascistes, plus dictateurs que ce qu'ils expriment aujourd'hui.

Nous ne reviendrons jamais à ce passé camarades, et vous, constituants souverains et vertueux, vous avez entre vos mains la responsabilité d'empêcher que cela arrive. Ils violent massivement les droits humains, nous, avec la constituante de 1999, nous avons réussi à instaurer au Venezuela le gouvernement, l'état des droits humains. Nous avons pu nous sentir libres, nous qui étions jeunes pendant la 4ème République, nous savons de quoi on parle... D'oppression, de répression, d'extermination, de tortures, de disparitions, de sévices. Voilà ce qu'a été notre jeunesse, revendiquée aujourd'hui par la Révolution Bolivarienne, grâce à notre Commandant Chávez qui nous a amené la liberté, qui nous a amené la démocratie, qui nous a amené l'égalité, qui nous a amené la justice.

Le 30 juillet, le peuple vénézuélien a envoyé de nombreux messages. La première chose qu'il a dite c'est "Nous voulons la paix", et la paix s'est faite, avec la constituante la paix est venue immédiatement, cher père Numa, la paix s'est faite. Le peuple est décidé à défendre la paix. Le peuple du Venezuela a dit aussi que le conflit violent ne va pas s'imposer au Venezuela pour permettre une intervention étrangère, nous avons envoyé beaucoup de messages, pas seulement pour le Venezuela mais aussi pour le monde :

Au chef de l'impérialisme, nous disons "Ne te mêle pas du Venezuela" et nous allons le répéter toutes les fois que cela sera nécessaire. Ne te mêle pas du Venezuela. A partir de cet hémicycle puissant, entourés par nos libérateurs, nous disons : Empire sauvage et barbare ! Ne te mêle pas du Venezuela parce que le Venezuela jamais ne faiblira, ni ne se rendra.

A la droite vénézuélienne et ses pivots, qui refuse de trouver un chemin pour l'action politique, qui refuse de renoncer à la violence criminelle, aux morts et aux balles, le peuple du Venezuela envoie aussi un message, le peuple du Venezuela lui a dit : "Nous voulons de l'action politique, opposition criminelle, arrête la violence", le peuple du Venezuela ne veut pas de la guerre, le peuple du Venezuela veut la paix, et le message a été très clair. A cette droite, nous disons que si elle ne prend pas le chemin démocratique et de l'action politique, la justice s'imposera. Cette constituante est là aussi pour faire justice, camarades. Le peuple du Venezuela ne va pas remettre son destin à une minorité violente, à une minorité apatride, liée à un projet anti-national, à un projet impérial.

A la communauté internationale : Ne vous trompez pas sur le Venezuela, le message est clair, très clair. Nous, vénézuéliens, nous allons résoudre notre conflit, nos crises, entre vénézuéliens et vénézuéliennes, sans aucune interférence étrangère, sans aucun mandat impérial. Il est temps, il est grand temps, et je le dis en guise de réflexion aux alliés historiques de la droite et de la bourgeoisie locale, nous disons : Il est grand temps que vous commenciez à regarder le peuple du Venezuela, nous sommes là depuis 19 ans et vous avez encore du mal à nous voir. Parce que vous ne reconnaissez pas le peuple. Voilà notre tragédie, les pouvoirs impérialistes ont du mal à reconnaître le peuple du Venezuela. Bon, cette constituante va se charger de leur faire comprendre de quel bois sont faits les vénézuéliens et les vénézuéliennes.

Je veux également dire à nos grands-parents, aux grand-pères et aux grand-mères qui sont sortis courageusement pour défendre la démocratie, la paix et la souveraineté : Merci aux papis et mamies. aux personnes avec un handicap, vous qui êtes devenus des milliers d'espérances pour exercer votre droit, pour ne jamais rendre ce que la révolution bolivarienne vous a donné, vous êtes les sujets historiques de notre révolution. Nous remercions aussi les étudiants, la jeunesse, aujourd'hui largement représentée dans cette Assemblée Nationale Constituante, où plus de 200 constituants sont des jeunes. Merci aux femmes, aux étudiants, aux travailleurs, promoteurs historiques de la transformation sociale et économique de la patrie. Aux chefs d'entreprise ici représentés, nous vous appelons, le peuple a dit "Construisez un modèle national, d'économie diversifiée", le Venezuela le mérite et le Venezuela en a toutes les capacités, pour construire ensemble et nous développer comme une grande puissance. C'est ce que nous méritons comme peuple. Nous voulons remercier aussi les paysans, les pécheurs, représentés aujourd'hui pour la première fois dans cette Assemblée Nationale Constituante, il y a là la souveraineté alimentaire tant recherchée par notre commandant Hugo Chávez. Aux communes, aux communards, aux missions, aux grandes missions, aux retraités représentés ici, les 8 secteurs qui accompagnent ce processus constituant et qui ont envoyé eux-aussi un message très clair, "nous voulons approfondir et consolider le pouvoir populaire".

Que le peuple ait plus de pouvoir, c'est de cela dont il s'agit camarades, pas d'aller en arrière. Je veux dire à la hiérarchie de l'Eglise - et notre cher père Numa nous excusera, lui qui n'a rien à voir avec ça-, dire à ces dirigeants ecclésiastiques qui avaient donné leur bénédiction au pacte de punto Fijo, que nous sommes des millions à être sortis dans les rues pour dire sous le ciel qui nous abrite : Nous voulons la paix, la paix soit avec nous tous, amen, amen, pour la paix au Venezuela.

Et la constituante est arrivée avec son pouvoir souverain et plénipotentiaire pour guérir, nous venons pour guérir le Venezuela de ses blessures, de la guerre économique, il n'y aura plus d'instruments qui facilitent l'agression multiforme à notre économie, parce que dans cette Assemblée Nationale Constituante que nous avons installé, nous avons le pouvoir de combattre la guerre économique que le parlement puntofijidiste a voulu mener dès qu'il s'est installé dans ce palais fédéral. Il est arrivé pour faire la guerre, à nos femmes, à nos grand-parents, à nos enfants, et il les a attaqués avec la guerre économique. Le peuple du Venezuela lui a envoyé un message très clair, il lui a dit "ton chantage sur la faim n'a pas vaincu la volonté du peuple du Venezuela". Au Venezuela, il n'y a pas de faim. Au Venezuela, il y a de la volonté. Au Venezuela, il y a de la détermination et il y a du courage pour défendre le Venezuela. Ecoutez-le à la fin ! Gouvernements de droite qui ne veulent pas écouter le peuple du Venezuela. Ici, il n'y a pas de crise humanitaire. Ici, il y a de l'amour.

Ce qu'il y a, c'est une crise de la droite fasciste qui cherche à détruire un peuple libre et indépendant. C'est la seule crise que nous avons à résoudre et nous allons la résoudre. Que le sache le monde entier, nous avons déjà nommé une direction de l'assemblée, que je salue, ce sont des vice-présidents de luxe, ils portent avec eux l'esprit de 1999, il y a là les veilleurs, les gardiens de notre constitution mère. Dès maintenant, il y a une assemblée constituante qui a le pouvoir d'agir, ne pensez pas que nous allons attendre des semaines, des mois, des années... Non, dès demain, nous commencerons à agir dans cette assemblée nationale constituante. Et les violents, les fascistes, ceux qui font la guerre économique au peuple, qui font la guerre psychologique au peuple, la justice va les poursuivre : Ne vous étonnez pas parce que le pouvoir constituant originaire est arrivé au Venezuela. Allez camarades, nous sommes là pour la rénovation constitutionnelle, pour l'entente nationale. Quand le président Nicolás Maduro a convoqué cette constituante, il a dit "je veux que tout le peuple du Venezuela s'installe dans un grand dialogue national", ceux qui ne croyaient pas dans l'assemblée constituante, vous avez ici notre main fermement tendue pour le dialogue national. Cette constituante est pour tous et toutes, camarades, il n'y a pas d'exclusion, le message de l'exclusion c'est celui de la droite apatride, le notre, c'est celui de l'inclusion, celui de l'égalité, et nous disons à tous, à toutes les vénézuéliennes et tous les vénézuéliens : nous gouvernerons pour vous, nous accompagnerons le président Nicolás Maduro pour vaincre la guerre qui s'est imposée contre le peuple du Venezuela.

Président Maduro, nous nous adressons à vous en tant que constituants souverains que nous sommes, nous n'allons pas vous laisser seul, vous êtes devenu aujourd'hui des millions d'hommes et de femmes, de vénézuéliens et vénézuéliennes, pour tenir les rênes de la patrie, pour conduire la révolution bolivarienne à bon port. Président Maduro, vous n'êtes pas seul, il y a ici le peuple du Venezuela qui vous accompagne et qui a compris votre appel à la paix, au dialogue, à la compréhension, à l'inclusion, à l'égalité, à la justice. C'est sans peur que nous allons vers la rénovation constitutionnelle, que nous allons vers la rénovation spirituelle à laquelle nous a appelé notre président.

Je veux donner un renseignement technique, excusez-moi en ce moment si émouvant, mais les Nations Unies qui ont fait un travail de recherche très complet et très spécifique sur les processus constituants, ont établi qu'au cours des 25 dernières années, plus de 100 processus constituants ont eu lieu dans le monde. Ils ont également établi que la vie utile d'une constitution est de 19 ans et que les gouvernements, les états et les pays les moins démocratiques, sont ceux dont les constitutions sont écrites par des comités d'experts. Ici, ce ne sont pas des experts qui sont arrivés. Ici, il y a le peuple du Venezuela, pour construire et écrire sa constitution. Et ça se voit, nous le voyons, sur la figure de tous nos constituants, les gens ordinaires du Venezuela sont là pour défendre la paix, pour défendre la souveraineté et défendre l'indépendance nationale. Le moment de renouveler notre constitution est arrivé, conformément aux standards internationaux. Et je le dis à cette communauté internationale qui a l'habitude d'agir avec un double langage : Je vous demande, pourquoi au cours de ces 25 dernières années, alors qu'il y a eu plus de 100 processus constituants dans le monde, aucun n'a fait naître une telle furie et une telle peur comme celles que déclenche le processus constituant vénézuélien.

Eh bien, j'ai la réponse. Car nous avons aussi envoyé un message aux peuples du monde, et nous avons dit : "Peuple, relève la tête et voit que, au Venezuela, on peut gouverner avec le peuple. Lève la tête et regarde le pouvoir politique, lève la tête et met en déroute ces oligarchies qui t'oppriment, qui te méprisent et qui te briment humainement".

Bon. Ils ont peur, bien sur que le processus constituant vénézuélien leur fait peur, parce que nous allons approfondir la démocratie participative et notre modèle gagnant de droits fontamentaux et d'égalité sociale. Camarades, le peuple est là avec sa sagesse et sa créativité pour accoucher une nouvelle histoire. Comme le Commandant Chávez et la constituante de 1999 avait accouché de ce beau projet et ce beau modèle, nous disons ici, Président Maduro, nous sommes avec vous pour accoucher une nouvelle histoire de dignité et de gloire pour le Venezuela. Camarades, il est temps, il est urgent de défendre notre patrie, c'est le moment de la rénovation, de la justice, de l'approfondissement des droits fondamentaux, du pouvoir populaire, de la paix, de la souveraineté et de la défense de notre mère, la terre.

Bien, camarades, corps souverain et plénipotentiaire, je veux terminer ces mots avec un poème de Pablo Neruda, de la Patria Grande, de notre Amérique Latine à qui nous envoyons aussi un message d'amour et d'espérance à partir du Venezuela : Pour dire aux peuples du monde, aux peuples d'Amérique Latine et des Caraïbes, que les processus de libération sont à l'oeuvre dans l'humanité et que nous le livrons, ici au Venezuela.

Nous donnons l'exemple qu'il est possible de libérer toute l'humanité. J'aime à vous saluer avec ce poème : "Pensons à la terre entière, en frappant un coup de poing sur la table. Je ne veux pas que le sang revienne pour tremper le pain, les haricots, la musique. Je veux que viennent avec moi le mineur, la petite fille, l'avocat, le marin, le fabricant de poupée. Que nous allions au ciné et que nous en sortions pour boire le plus rouge des vins. Je suis venu pour chanter et pour que tu chantes avec moi". Pablo Neruda.

Chantons tous à la paix et à l'union des vénézuéliens,
chantons à la patrie libre et souveraine,
chantons au "bravo pueblo" qui a accouché ce pouvoir souverainissime.
Un grand merci, camarades.

Traduction : CM




samedi 5 août 2017

La violence politique au Venezuela


par Marco Terrugi in Hasta el nocau
Sociologue, journaliste franco-argentin
résident en ce moment au Venezuela

Il y a un casse-tête des morts. Plus de cents, en plus de cents jours de conflit. Pour l'opposition médiatique, le problème se résume à l'idée que tous ont été assassinés par le gouvernement. Peu importe qu'il n'y ait pas de preuves à l'heure du grand titre ou qu'il n'y ait pas eu d'enquête pour fonder une affirmation comme celle-là. Ce qui importe, c'est l'impact, le nombre, le scandale, le mort empilé sur l'autre mort et qui construit petit à petit l'idée d'ores et déjà consolidée partout : Le régime est autoritaire, dictatorial, il viole les droits de l'homme.

Dans d'autres cas, la responsabilité n'est pas attribuée au gouvernement sinon à la crise, au conflit. Un vieux truc, avec en grand titre "La crise a fait deux nouveaux morts", et pourtant, ils furent assassinés par la police aux ordres du gouvernement argentin, Darío Santillá et Maximiliano Kosteki en 2002. A l'époque, ce ne fut pas "la crise", cela ne l'est pas non plus au Venezuela aujourd'hui. S'il reste un peu de journalisme dans cette bataille politique, on devrait au moins conserver l'enquête comme base pour construire les informations et l'opinion. Il s'agit-là d'un souhait presque ingénu : le mensonge est devenu une forme centrale de communication dans ces médias.

Il y a enfin un autre truc : Dire sans nommer. "Des morts pendant la journée électorale" ou par exemple, "ils ont incendié le siège de la magistrature" quand il est évident - il suffit de suivre les mouvements - que l'édifice a été incendié par des groupes de choc qui, à chaque manifestation de l'opposition, sont en première ligne et reçoivent leurs ordres des dirigeants de Voluntad Popular. Dans ce cas, il n'y a pas d'auteur de l'action. Ni le gouvernement, ni la crise, personne. Et encore moins l'opposition.

Ces trois variables sont répétées quotidiennement par des dizaines de grands titres, sur la une, au Venezuela et dans le monde. Le résultat, c'est qu'une majorité est convaincue du fait que le gouvernement est l'auteur de toute la violence et des morts. Combien de fois faut-il répéter une idée pour qu'elle devienne une vérité ? Dans le cas de l'opposition vénézuélienne, l'architecture communicationnelle est écrasante : Elle peut compter sur les principaux médias de chaque pays du continent, des Etats-Unis et d'Europe, articulés entre eux.

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Les morts, donc. Qui est responsable ? Il y en a plus de cent, avec un nombre exact diffus : 125? 127? Plus? Moins? Difficile d'avoir une certitude en raison du large éventail de causes des morts - certaines ont été notées dans des analyses et exclues par d'autres-, en raison aussi des sources d'information, du croisement des données entre les pouvoirs publics et les sources journalistiques. Les causes ont été diverses : des barricades et des blocus, des pillages, des brûlés vifs ou des lynchés, la manipulation d'explosifs, le fait de passer près d'une manifestation sans y participer, les bagarres entre manifestants, les tirs des bandes criminelles, de l'intérieur des manifestants, par les corps de sécurité de l'Etat, entre autres.

Dans ce total, il y a eu 11 victimes par balles des corps de sécurité. Suite à cela, 39 agents sont en procès, détenus ou mis en examen. C'est à dire qu'environ 10% des morts sont de la responsabilité de l'Etat. Autre élément : Parmi le total des morts, au moins 7 personnes sont des membres d'une des forces de sécurité. Le discours qui dit que tous les morts sont causés par le gouvernement tombe rapidement.

Alors qui sont les responsables des 90% restants ? Au niveau intellectuel, ce sont les dirigeants des partis d'opposition, en particulier Voluntad Popular et Primero Justicia, qui conduisent le plan d'escalade de la violence dans la rue. Au niveau matériel, cela dépend de chaque cas : des paramilitaires, des groupes de choc, les jeunes des manifestations eux-mêmes, des gens isolés incités à tuer - car pour une partie de l'opposition, il est devenu légitime de tuer du chaviste. Le Ministère Public n'a détenu personne de l'opposition, ni auteur matériel ni intellectuel, même quand l'évidence a été enregistrée par des caméras, quand par exemple un des jeunes a été lynché et incendié parce qu'il passait auprès d'une manifestation en plein Caracas. Et ce n'est pas un hasard, car l'alignement de la Fiscalia sur l'opposition est déclaré. La justice est absente et cette absence élargit le trou noir de la mort.

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Il suffirait quelquefois d'appliquer un raisonnement logique, comme dans le cas des élections de dimanche dernier. L'opposition a annoncé qu'elle empêcherait que les scrutins aient lieu et elle a agi en conséquence. Elle a assassiné un candidat dans la nuit de samedi, elle a attaqué 206 centres de vote, elle a affecté gravement la participation dans 5 municipalités, elle a fait éclaté une bombe sur la police, elle a déployé des groupes paramilitaires pour empêcher que les gens ne votent, elle a tiré sur des électeurs, sur des corps de sécurité de l'Etat. Et pourtant, l'information mondiale a été la même partout, de Clarín au secrétaire de l'OEA : Le gouvernement a été responsable de la violence. Mais pourquoi le gouvernement aurait-il fait ça le jour des élections clefs de dimanche ? Pourquoi aurait-il lancé des grenades sur les bureaux de vote et fait explosé une bombe contre la police ? Les matrices des médias peuvent détruire jusqu'au bon sens.

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Le Venezuela est frontalier avec la Colombie, épicentre du para-militarisme. Il a été infiltré pendant de nombreuses années par des groupes paramilitaires qui s'y sont enracinés et qui en lien avec des bandes criminelles, ont formé leur propre force (logistique, surveillance, structuration). Il y a les témoignages des populations, les attaques perpétrées avec des armes de guerre contre les garnisons militaires ou les postes de police, les zones qu'ils contrôlent, leurs campements. Et pourtant, ils n'existent pas, ni dans les grands médias, ni dans les discours des dirigeants de la droite, ni dans les analyses de certains intellectuels.

Mais ils existent bien dans la vie des gens : Les maisons taguées, les chavistes des villages qui doivent s'en aller à cause des menaces, les camarades assassinés, les commerces qui doivent fermer sinon ils sont attaqués, et aussi les transports, les couvre-feux. Cela a lieu dans des municipalités de Táchira, Mérida, Lara, Barinas, au cours des déploiements qu'ils réalisent pendant les semaines d'escalade du conflit à chaque coin du pays.

La formule est la suivante : Chaque fait de violence doit être nié et au cas où l'action serait trop évidente, elle doit être dénoncée comme un coup du gouvernement contre lui-même. Même si c'est invraisemblable, comme de dire que c'est le gouvernement qui a lancé des grenades depuis un hélicoptère sur le Tribunal Suprême de Justice. Le plan golpiste déploie des vagues de violence, en légitime une partie, en cache une autre et construit l'idée-force d'une opposition "pacifique, légale et massive" qui est victime d'une répression démesurée. Les médias lavent la figure de la droite tous les jours, et ils ne sont pas les seuls : Ils y a aussi ceux qui centrent toute leur critique sur le gouvernement et minimisent l'action golpiste jusqu'à la rendre invisible.

Il y a une grande querelle sur le sens et les acteurs de la violence, afin de les démasquer, mettre un nom sur la mort et les obliger à sortir de l'anonymat.

On ne peut pas comprendre les réponses du chavisme - avec ses succès et ses erreurs - si on ne comprend pas la stratégie déployée, ou si on choisit délibérément de la cacher. Que doit faire un gouvernement et un mouvement populaire, avec ses contradictions infinies, face à une opposition qui mise sur une solution violente et qui déploie un bras armé pour réaliser des actions militaires ? Comment doit-il agir ? Les réponses sont variables. Cela va d'un schéma de contention en misant sur l'usure, à l'essai de formes de défense intégrale comme l'avait envisagé Hugo Chávez à travers les Milices Bolivariennes. Encore que sur ce dernier point, il y ait un autre débat : Il semblerait nécessaire de construire des formes de réserve des territoires dépendants des territoires eux-mêmes, et pas seulement de la Force Armée Nationale Bolivarienne - comme l'est la Milice Bolivarienne- tout en étant articulé avec elles. Rien en dehors de l'unité.

Il s'agit d'un point clef. Comment défend-on un processus populaire ? Qui le défend ? Est-ce seulement l'appareil de l'Etat ?

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La violence est devenue la norme au Venezuela. Le premier homme qui a pris feu dans la rue a choqué, le deuxième aussi, le troisième a commencé à faire partie du possible, le cinquième est entré dans la logique du conflit. Par contre oui, il a eu un impact, celui qui lynché puis brûlé, a été roué à coup de pieds comme un chien par ses assassins. Cette normalisation fait partie de l'objectif de la violence de l'opposition, elle cherche à frapper le tissu social, à le décomposer, à faire s'affronter les parties jusqu'à légitimer le lynchage comme pratique sociale de l'opposition des classes moyennes et supérieures. Jusqu'à maintenant, on n'a vu personne lynché dans un quartier populaire à cause de sa posture politique.

Le gouvernement s'est-il trompé et a-t-il commis des violences qu'il ne devait pas commettre ? Oui. Les chiffres sont là, les gens emprisonnés, les organes de sécurité de l'Etat qui ne sont pas ce que nous voudrions qu'ils soient, qu'ils ont cherché à transformer pendant ce temps de révolution et qui ne sont encore qu'à la moitié du chemin. Le chavisme a des contradictions, des limites, une lutte des classes interne, des traîtres, des bureaucrates, des corrompus impunis placés à des postes de direction, et une longue liste de problèmes. On doit en débattre, les contester : C'est sur la résolution ou pas de ces points que la possibilité du projet se joue.

Mais le problème, c'est l'inversion des rôles, le fait de considérer le gouvernement comme l'auteur de l'escalade de violence et non comme celui qui exerce une réponse - avec ses erreurs- contre un essai de coup d'état avec la participation directe des Etats-Unis. Regarder le Venezuela à travers le show médiatique, l'avalanche esthétique victimisante et héroïque de ses mobilisations, la production massive de contenus - qui coûte des millions de dollars - les pages de l'opposition et Aporrea, plus le chercheur quelconque d'une université étrangère qui "analyse les collectifs", conduit à gober complètement le récit du golpisme.

Débattre sur le chavisme est une nécessité. Passer du côté du bloc conduit par les Etats-Unis est une erreur historique. Ce ne serait pas la première fois que cela arrive dans l'histoire de la gauche du continent.

@Marco_Terruggi

Traduction : CM



Entretien avec Jorge Arreaza, ministre des affaires étrangères du Venezuela


Source : Telesur

Le chancellier vénézuélien affirme que l'Assemblée Constituante, présidée par Delcy Rodriguez, deviendra un grand forum du dialogue national.

Au cours d'un entretien ce vendredi sur Telesur, Jorge Arreaza a assuré que l'installation de l'Assemblée Nationale Constituante (ANC) a ramené la stabilité et la paix dans le pays, après trois mois de violence de l'opposition dans les rues. "Cette semaine, il n'y a pas eu de manifestation. Après les élections de dimanche, nous avons eu la paix" explique Arreaza en assurant que l'objectif de l'ANC était d'atteindre la stabilité du pays et qu'il a été atteint.

Le diplomate souligne que "le Venezuela a donné une leçon avec l'ANC qui a amené la paix, et l'exécutif national souhaite que les autres pays comprennent ce qui a eu lieu le 30 juillet dernier" dans le scrutin auquel ont participé plus de huit millions de vénézuéliens. Il explique que même les vénézuéliens sympathisants de l'opposition qui ne soutiennent pas l'ANC ont cessé les actions de déstabilisation dans les rues et sont retournés travailler pour le pays. Par contre, il critique les médias qui ne montrent pas la réalité d'un pays qui est revenu à la paix.

Pour Arreaza, le gouvernement vénézuélien espère qu'à travers l'ANC, "la violence de l'opposition sera vaincue avec respect" et il est convaincu qu'ils atteindront la certification de la démocratie. Ce vendredi, l'Assemblée Nationale Constituante s'est installée au Palais Fédéral du Venezuela, avec 545 constituants, qui travailleront à partir de ce samedi pour consolider et renforcer la souveraineté nationale. Elue par plus de huit millions de vénézuéliens, l'ANC cherche à être un grand forum du dialogue national. "Nous allons insister là-dessus et on appellera tous les secteurs" affirme-t-il.

Les Etats-Unis doivent respecter la souveraineté du Venezuela

Le chancellier Jorge Arreaza exige que le gouvernement des Etats-Unis respecte la souveraineté et l'autodétermination du Venezuela. Ainsi, il affirme espérer que le gouvernement des Etats-Unis ne continuera pas ses "lamentables déclarations" qui cherchent à discréditer la démocratie de ce pays sudaméricain. "Trump ne pourra pas aller contre la volonté du peuple de construire la paix" s'exclame-t-il.

"Nous exigeons le respect du gouvernement des Etats-Unis, le respect de notre souveraineté et de notre autodétermination, parce qu'avec l'élection du dimanche, le peuple du Venezuela a parlé et a donné une leçon de détermination" dit-il.

Ingérence du Mexique, de la Colombie et de la CIA

Se référant à l'ingérence du Mexique et de la Colombie dans les affaires intérieures du Venezuela, il indique que ces gouvernements ont violé la diplomatie et les relations de respect entre pays. "Le gouvernement du Mexique se trouve mal quand on évoque la question de sa subordination aux intérêts du gouvernement des Etats-Unis" signale-t-il.

Il rappelle que le directeur de la CIA a visité le Mexique et la Colombie pour mettre en oeuvre des mesures de violence et de déstabilisation au Venezuela, parce qu'ils veulent les ressources minérales et naturelles de cette nation.

A propos des ministres des affaires étrangères de l'Argentine, du Brésil et du Paraguay, il signale qu'au sein du Mercosur (Marché Commun du Sud), "ils cherchent à exclure le Venezuela. C'est une manoeuvre de plus". Concernant l'Organisation des Etats Américains (OEA), il assure qu'elle cherche à mettre à mal le Venezuela devant les autres pays et suit les orientations de petits groupes qui cherchent la violence : "La OEA répond à des intérêts impérialistes et face à eux, le Venezuela continuera à défendre sa souveraineté et son autodétermination".

Arreaza affirme que le Gouvernement vénézuélien veut maintenir des relations de respect avec toutes les nations et attend la même chose en retour. "La diplomatie bolivarienne de la paix promeut la construction d'un monde pluripolaire et multicentrique qui respecte les relations entre les pays". A ce propose, il a cité les exemples de la Chine et de la Russie, comme pays fondamentaux pour la consolidation des relations multipolaires.




vendredi 4 août 2017

Venezuela et le renouvellement des élites... Un autre point de vue colombien


Par Luis Eduardo Celis in La silla vacia

Il y a plusieurs crises au Venezuela. Elles s'articulent dans une dispute entre projets de société, leaderships et légitimités qui ne peuvent être évalués de manière isolée. C'est une crise pleine de contradictions.

Pour une compréhension plus rigoureuse, il conviendrait de présenter le Chavisme comme alternative à des élites républicaines qui avaient envisagé un projet de rente pétrolière et qui n'avait pas créé une économie permettant d'engendrer des capacités diversifiées et démocratiques. Ce modèle, qui est entré rapidement en crise, a eu comme réponse un dirigeant qui a su offrir une alternative. De manière charismatique, il s'est érigé en "liquidateur" d'une tradition politique qui avait été hégémonique dans la conduite de la société vénézuélienne pendant tout le XXème siècle. Les "Adecos" (sociaux libéraux) comme les "Copeianos" (démocrates chrétiens) ont été anéantis politiquement et démocratiquement par l'alternative présentée par Hugo Chávez à la fin du siècle précédent.

Cette élite politique liquidée n'a aujourd'hui aucune capacité de leadership. Et pendant près de 20 ans de "Chavisme", ils ne sont pas arrivés à positionner un discours de changement face à cette vieille tradition.

A la base de la crise, il y a la bataille entre différents projets de société. Des projets qui ne sont pas clairement définis et qui restent relativement superficiels. Avec des simplifications que les adversaires se chargent d'accentuer.

Pour comprendre cette crise, il faut aller au delà du débat et des grands discours. Il faut penser que la crise de la société vénézuélienne va au delà des "Chavistes" et de la "MUD". 

S'il est vrai qu'il faudrait évaluer l'exercice de près de 20 ans de gouvernement du "Chavisme", je considère que les défis de la société vénézuélienne débordent le cadre du débat politique et questionnent les bases d'une société profondément fragile dans son ordre économique et social. Dit de manière simple, la crise de l' "Etat Pétrolier" est plus qu'une crise conjoncturelle et elle questionne les possibilités de la société vénézuélienne à construire une société de droits et une citoyenneté de qualité.

En nous arrêtant sur la crise de la société vénézuélienne et sa profonde dépendance au pétrole (avec toute la fragilité que cela sous-tend), il faudrait en arriver à l'évaluation des débats actuels et à la pugnacité qui fait du Venezuela une société divisée.

Avant Chavez, la rente pétrolière était concentrée entre les mains d'élites florissant au milieu d'une pauvreté offensée. Chavez a capitalisé ce mécontentement et a proposé une "redistribution élargie" de la rente pétrolière. Mais la grande question de la société vénézuélienne, la diversification économique et la construction d'une économie sociale démocrate n'a pas été résolue.

Le rayonnement politique du Chavisme s'est basé sur un discours qui a cherché à prendre ses distances par rapport aux Etats-Unis. Un projet d'autonomie et de revendication des intérêts latinoaméricains a été proposé. Cela a coïncidé avec une montée des forces de gauche dans une bonne partie du continent, forces qui ont été soutenues par le "chéquier pétrolier", donnant au Chavisme et au Vénézuela un leadership dans le continent.

Le Chavisme a oscillé entre les alliances avec des secteurs du pouvoir économique et sa lutte contre eux. Ceci a peu à peu détruit sa capacité précaire d'approvisionnement et d'autosuffisance. Des secteurs clefs comme l'agroalimentaire et les médicaments n'ont jamais été consolidés et, en dépendant des achats internationaux, ils se sont retrouvés enchaînés à la baisse des prix du pétrole. L'argumentaire chaviste explique qu'ils ont été soumis à une "guerre économique", de fait, les signes de désapprovisionnement et de pénurie ont augmenté de manière dramatique.

De son côté, l'opposition a mis l'accent sur le désastre économique d'une société habituée aux subventions et au "paternalisme" qu'il avait été possible d'exercer quand les prix du baril de pétrole tournait autour des 100 dollars.

Il y a de toute évidence une confrontation ouverte dans la société vénézuélienne. Mais le maniement médiatique, tout au moins ce que nous voyons en Colombie, ne montre pas la profondeur de la crise et en reste à la superficie d'une manipulation sur les "bons" et les "mauvais", les "démocrates" et les "tyrans", qui simplifie à l'extrême une situation plus complexe.

Bien sur qu'il y a des excès, des violences des deux côtés et le non respect des institutions. Mais nous devrions prendre de la distance sur le fait que le débat et la confrontation correspondent à une dispute entre des projets, car en réalité, il n'y a pas grand chose dans les propositions et dans les projets pour dépasser la fragilité d'une économie pétrolière. Une économie dépendante et fragile. C'est un thème qui est débattu et reconnu comme crucial par la société vénézuélienne, mais qui n'est pas résolu.

La Constituante va de l'avant et la crise politique va s'approfondir. Pour le moment, ce que nous allons voir, c'est une détérioration de l'action politique institutionnelle et une mobilisation dans les rues qu'il est difficile de mesurer en terme de légitimité et de soutien de la société vénézuélienne.

Au beau milieu de cette crise, aucun tiers ne sera déterminant dans la réalité politique du Venezuela et les forces politiques internes devront construire les concertations nécessaires.

@luchocelisnai
Sociologue colombien, assesseur de Redprodepaz

Traduction : CM





Nouvelle victoire du VENEZUELA à l'ONU au grand désespoir de la droite


La droite voulait le soutien de l'ONU pour ensuite justifier une intervention étrangère contre le gouvernement légitime du Venezuela, mais l'ambassadeur d'Egypte Amr Abdellatif Aboulatta, actuel président du Conseil de Sécurité de l'Organisation des Nations Unies (ONU) pour ce mois-ci, a affirmé ce mercredi que la situation au Venezuela ne représentait pas une menace pour la paix et la sécurité internationale.

Il a dit que les faits qui ont lieu au Venezuela sont des affaires internes et cette position élimine la possibilité que la question soit examinée dans les travaux du Conseil de Sécurité de l'ONU. Le représentant de l'ONU a fait ces déclaration aux médias lors de la présentation du programme de travail du Conseil pour ce mois d'août.

Les réflexions du diplomate concernent la situation qu'affronte actuellement le Venezuela, où depuis le mois d'avril, l'opposition développe des manifestations violentes et appelle à une intervention étrangère pour faire tomber le gouvernement du président constitutionnel Nicolás Maduro. Les Etats Unis avaient à la mi-mai apporté la question du Venezuela en consultation au Conseil de Sécurité de l'ONU mais n'avaient pas réussi à obtenir un soutien international contre le pays sudaméricain.

De son côté, le représentant permanent du Venezuela à l'ONU, Rafael Ramírez, a affirmé ces jours derniers que toutes les agressions qui prétendent isoler la Révolution Bolivarienne instaurée par le commandant Hugo Chavez échoueront. Il a également souligné que la campagne contre le Venezuela et son gouvernement ne trouve des échos que dans l'extrême-droite des Etats-Unis et chez les porte-paroles discrédités de la droite mondiale en rappelant "Nous étions au Conseil de Sécurité jusqu'au mois de décembre dernier, nous sommes au Conseil des Droits de l'Homme à Genève et au Conseil Economique et Social (Ecosoc). Nous présidons la quatrième Commission de l'Assemblée Générale, le Mouvement des Pays Non Alignés et le Comité Spécial de la Décolonisation. C'est donc que nous continuons à déployer notre politique de paix et de solidarité".

Source : insurgente.org
Traduction : CM




5 clefs sur le Venezuela (à la sauce colombienne)

Estética del poder @essoalvarez

Mieux vaut ne pas jouer avec le feu quand on a un cadavre dans le placard comme les anciens et nouveaux gouvernants de Colombie.

Par Yezid Arteta Dávila in Semana

1. La propagande

Depuis l'occupation de l'Irak en 2003, il n'y a pas eu de guerre médiatique à grande échelle comme celle qui a lieu ces derniers jours autour du Venezuela. L'Irak avait été la cible d'une grande tromperie car Saddam Hussein, on l'a prouvé et ce fut reconnu ensuite par l'ex-premier ministre britannique Tony Blair, ne détenait pas d'armes de destruction massive comme l'affirmaient les puissances occidentales et le diffusaient leurs grandes chaînes d'information. Et aujourd'hui, l'Irak est réduit en cendres, on l'a vu dans les récentes images de Mossoul présentées par ces mêmes chaines d'infos qui s'étaient fait l'écho de la grande tromperie.

Ces jours-ci, l'Arabie Saoudite prépare la décapitation de 14 personnes qui ont été condamnées par le Tribunal Suprême de la Monarchie en raison de leur participation à ce qu'on a appelé le "Printemps Arabe" - parmi elles se trouve un étudiant de l'Université du Michigan. On les accuse d' "Incitation au chaos" et d'emploi de cocktails molotov pendant les manifestations. Mais en dehors d'Amnesty International et de certains sites alternatifs, ces sentences n'ont pas été condamnées par les leaders occidentaux et n'ont pas éveillé l'intérêt des agences internationales d'information. Ainsi, quand une femme saoudienne est condamnée à recevoir des coups de fouet pour avoir conduit une voiture ou lapidée pour une affaire sentimentale, l'Occident regarde d'un autre côté.
Vers le Venezuela, par exemple.

Dans une avenue du secteur d'Altamira - où réside la population la plus riche de Caracas - un engin explosif éclate au passage d'une patrouille motorisée de la Garde Nationale Bolivarienne et il en résulte sept soldats blessés. Quelques semaines auparavant, un militaire lunatique prend le contrôle d'un hélicoptère de la Police scientifique et lance une attaque à la grenade sur le Tribunal Suprême de Justice du Venezuela. Ces deux faits, qui selon les barèmes actuels correspondent à la catégorie de "terrorisme", sont largement relayés par la presse occidentale. En fait, pour l'Occident, contrairement à la Monarchie saoudienne, le gouvernement du Venezuela est un ennemi géopolitique à abattre, d'autant plus que la patrie de Bolívar possède les plus grandes réserves de pétrole de la planète, mais aussi du gaz, de l'or, de l'uranium, du coltan, du thorium et l'eau qui se trouve dans son territoire. Tout est bon pour assurer le robinet du pétrole : une guerre, un coup d'Etat, une occupation militaire, un blocus économique. L'Irak et la Lybie ont été détruits mais le brut n'a pas cessé de couler.

2. La démocratie

En vue de la bataille électorale de 2018, les dirigeants politiques traditionnels de Colombie ont converti le Venezuela en circonscription électorale additionnelle en plus des 32 qui existent déjà dans le pays. Ils mettent le nez dans les affaires internes du Venezuela pour obtenir des bénéfices en Colombie, portent la situation du Venezuela à la sauce colombienne. Je ne sais pas jusqu'où ces éternels opérateurs politiques colombiens auront la conscience tranquille ou les mains propres pour faire de grands laïus sur la démocratie et les Droits Humains. Mieux vaut ne pas jouer avec le feu quand on a un cadavre dans le placard comme les anciens et nouveaux gouvernants de Colombie. 

Revenons à vol d'oiseau sur l'histoire récente de la Colombie. 
  • Cinq candidats à la Présidence assassinés par balle : Gaitán, Gómez Hurtado, Pardo Leal, Galán, Pizarro. 
  • Quarante-quatre parlementaires condamnés de 2006 à 2010 en raison de leur appartenance à des organisations criminelles responsables de centaines d'assassinats. 
  • Le jugement des civils par des cours martiales pendant le gouvernement libéral-conservateur de Turbay Ayala.
  • Des centaines de jeunes des quartiers populaires assassinés à tour de bras - les faux positifs - présentés ensuite comme des rebelles morts au combat.
  • Les dossiers sur des officiers des Forces Armées et des politiques condamnés pour narcotrafic  par des tribunaux aux Etats-Unis.
  • Des centaines de hauts fonctionnaires publics qui purgent des peines parce qu'ils se sont appropriés de l'argent public.
  • La suppression de l'opposition politique par le biais des assassinats comme ce qui est arrivé avec l'Union Patriotique.
  • Des centaines de journalistes assassinés parce qu'ils racontent la réalité.
  • L'appareil d'espionnage de l'Etat - le DAS - contrôlé par des organisations criminelles.
Mieux vaut se taire quand on a un tel casier judiciaire.

3. Prendre position

Matador - qui est à mon goût le meilleur caricaturiste colombien - a fait un dessin sur lequel apparaissent quelques uns des dirigeants les plus connus de la gauche du pays, passant sur la pointe des pieds sur l'affaire du Venezuela. C'est un classique en Colombie : Faire profil bas ou ne rien dire sur les thèmes épineux du genre de ce qui arrive au Venezuela. D'autres par contre, naviguent dans les eaux politiques à partir du moment où le vent vient en poupe. Rien n'est plus horrible qu'un personnage public qui fait de l'arrivisme une tactique pour maintenir sa ligne de flottaison politique.

Gustavo Petro, je dois le reconnaître, a été le politicien colombien le plus équilibré sur la question vénézuélienne. Ses paroles ne correspondent pas au positionnement idéologique classique qui ne perçoit la réalité qu'en deux couleurs. Petro, avec la Constitution Politique de la Colombie entre les mains, défend l'autodétermination du Venezuela sur la base de l'article 9 de notre Carta Magna et appelle les gouvernants de Bogotá à respecter la loi, tout en construisant l'intégration de l'Amérique Latine et des Caraïbes. Alors que Petro appelle au dialogue entre les parties pour arriver à un accord, la majorité des aspirants présidentiels se chargent de lancer de l'huile sur le feu et attisent les flambées de violence qui engendrent des victimes dans les rues.

4. La Conclusion

Le Venezuela est le théâtre d'une lutte politique interne acharnée. C'est l'ABC de la politique. Mais cette lutte interne est faussée par des pouvoirs externes qui ont mesuré l'importance des ressources naturelles que contient le territoire vénézuélien, ressources qui ont servi dans le passé à enrichir certains margoulins qui vivent comme des magnats dans le quartier de La Florida, alors qu'à Caracas, les miséreux se multiplient sur les coteaux. Le président Hugo Chávez avait inversé les rôles quand il a réparti la rente pétrolière entre les millions de pauvres du Venezuela et fait en sorte que l'Amérique Latine récupère sa souveraineté et son identité. Mais le modèle rentier dérivé de la richesse pétrolière n'a changé sous aucun gouvernement, avec ceux de Chávez et Maduro non plus. C'est donc un modèle dépendant dont profitent un certain nombre de corrompus qui sont aujourd'hui aussi bien au gouvernement que dans l'opposition. 

Et la violence au Venezuela tue des gens du gouvernement et de l'opposition. Et l'immense majorité des vénézuéliens fuit la violence. Il n'y a donc pas d'autre chemin que le dialogue à moins que le Venezuela ne devienne une société comme la colombienne : divisée et violente. Entre le gouvernement et l'opposition, on commence à entendre des voix sensées - comme celle du député opposant Henry Ramos Allup - qui appellent à ce que toutes les violences cessent. Le dialogue, l'accord, les urnes et l'autodétermination sont les uniques options raisonnables pour que le pays des Libertadores dépasse cette croisée des chemins.

5. A faire

Plus que des devoirs, voici deux suggestions sur la question vénézuélienne.
La première :  Qu'une étudiante en journalisme écrive une thèse sur la couverture médiatique de la crise vénézuélienne par les médias espagnols et colombiens.
La deuxième : Lire "Le Sacre du Printemps", le roman cultissime du précurseur du réel merveilleux, Alejo Carpentier, pour comprendre les vénézuéliens.

@Yezid Ar D
Ecrivain et analyste politique

Traduction : CM