lundi 28 novembre 2016

L'exemple de Marcos Ana : Une arme chargée de futur

 Marcos Ana, communiste poète espagnol, est mort ce jeudi 24 novembre l'âge de 96 ans


Source : www.publico.es

Par Alberto Garzón Espinosa, coordinateur de Izquierda Unida
       Esther López Barceló, responsable de la mémoire démocratique de Izquierda Unida

"L'unique vengeance à laquelle j'aspire, c'est de voir triompher les nobles idéaux de liberté et de justice sociale". Ces mots décrivent l'esprit d'un homme qui avait été baptisé Fernando Macarro mais qui décida de changer de nom en prenant ceux de son père et de sa mère : Marcos Ana. Ce beau geste n'était pas un caprice mais correspondait à une nécessité : Il fallait éviter la censure franquiste.

Marcos Ana était né au sein d'une famille de journaliers et il abandonna ses études à douze ans pour aller travailler. Il a vécu ses années d'enfance entre Ventosa del río Almar et Alcalá de Henares. Les dures conditions économiques qui ont marqué les premières années de sa vie ont fait émerger sa conscience de classe, et c'est à seize ans qu'il décida d'entrer aux Jeunesses Socialistes Unifiées. Il était donc très jeune quand survint le traumatisme du coup d'Etat et son engagement politique le porta à participer activement au Front de Madrid pour défendre la IIe République avec le cri "¡No pasarán!".

Pendant les tristes années de la guerre, il perdit son père, assassiné au cours d'un bombardement de la Légion Condor, envoyée par Hitler pour aider Franco dans son entreprise de destruction de la population civile espagnole pendant la guerre civile.

Marcos Ana a été également de ceux qui, parmi les milliers de défenseurs de la démocratie et de la IIè République, traversèrent le pays en mars 1939 pour rejoindre le port d'Alicante. Toutes les forces politiques démocratiques et les organisation syndicales qui avaient affronté le coup d'état franquiste s'y concentrèrent en y cherchant l'unique sortie possible, au vu de la victoire imminente du fascisme. Comme aujourd'hui, des milliers et des milliers de personnes, des familles entières, se rassemblèrent face à la Méditerranée en espérant embarquer vers la paix.

Mais, il y a 77 ans, le port d'Alicante devint une prison aquatique. Les bateaux tant attendus ne sont jamais arrivés à cause du blocus que maintenait la flotte fasciste. A la fin de la guerre, Marcos Ana se trouvait toujours à Alicante comme tant d'autres. Détenu par les troupes fascistes italiennes, il serait alors déporté au trop célèbre Camp des Amandiers, qui se retrouva sans fruits le premier jour et sans feuilles au quatrième, à cause de la faim. Il fut ensuite déporté au camp de concentration de Albatera dont il échappa grâce à sa mine de jeunot.

Mais l'Espagne toute entière commençait à devenir une vaste prison, un bagne insatiable qui ne cessait de creuser des fosses. Elle était aussi pleine de mouchards et d'espions franquistes. C'est ainsi qu'un indic de la police le dénonça à la police franquiste et qu'il fut de nouveau détenu. Après la guerre civile, la paix n'est jamais arrivée, mais plutôt la dictature. Une dictature qui dura 40 ans, pendant lesquels Marcos Ana passa 23 ans en prison. C'était la condamnation d'un combattant de la démocratie.

Il a souffert de la vie carcérale à Porlier, Ocaña et Burgos, en passant par les tortures et les humiliations généralisées par la Direction Générale de la Sécurité située à la Puerta del Sol, symbole de la répression du régime, par les fenêtres de laquelle fut lancé le corps de Julián Grimau après une raclée, pour ensuite le fusiller complètement décomposé. Mais l'humanité de Marcos se manifestait dans les moments les plus durs, quand par exemple, il expliqua à un de ses bourreaux après une agression : "Je lutte pour une société dans laquelle personne ne pourra vous faire ce que vous êtes en train de me faire".

Il a reçu deux condamnations à mort, la première pour son activité politique en défense de la légitimité démocratique pendant la guerre civile, et la deuxième quand on a découvert son organisation clandestine dans la prison, ce qui le fit passer devant un Conseil de Guerre. C'est à cette époque-là que Fernando Macarro était devenu le poète communiste Marcos Ana, le poète qui anima ses camarades avec ses mots et ses rimes. En 1961, il fut mis en liberté grâce à une campagne internationale motivée par sa poésie. La pression internationale et nationale obligea Franco à signer la sortie de prison d'un homme qui y était depuis plus de vingt ans, et c'est ainsi que Marcos Ana a pu continuer à porter la lutte pour la liberté de ses camarades et de son peuple au reste du monde.

Sa vie fut dédiée à la lutte pour les valeurs de la démocratie, la liberté et la justice, basées sur les belles convictions communistes qu'il résuma ainsi dans ses vers :

"Mon péché est terrible;
J'ai voulu remplir d'étoiles
le coeur de l'homme".

Marcos a été une des références, un des héros de la résistance antifasciste, à qui nous devons ce que nous sommes et aussi ce pourquoi nous rêvons. L'exemple de sa vie nous enseigne que chaque droit dont nous jouissons s'est construit sur les échos des voix de milliers d'hommes et de femmes qui ont lutté pour les conquérir.  Et aussi sur les larmes et la vie même de ceux qui ont tout donné pour une société de justice sociale. C'est la raison pour laquelle, en ce triste jour, nous allons lui rendre hommage avec l'engagement ferme et collectif de suivre son exemple, en revendiquant sa mémoire et ses valeurs. Nous le faisons avec ses propres mots, qui nous aident à assumer son départ et à nous lever chaque matin avec le désir d'être à la hauteur de tout ce qu'il nous a donné et de ce que nous lui devons : "J'ai comme consigne de vivre pour les autres. C'est la meilleure manière de vivre pour soi-même"

Avec le poing levé, nous, communistes te disons adieu: ¡Hasta siempre Camarade!



mardi 22 novembre 2016

Lettre ouverte du Secrétariat des FARC au Président Juan Manuel Santos

#ArrêtezLeMassacre

Lettre ouverte au Président
Juan Manuel Santos

Ecrite par le Secrétariat National des FARC-EP

La situation est dramatique et très préoccupante : plus de deux cents morts cette année, sous couvert d'une impunité totale. Un nouveau génocide est en marche contre les leaders sociaux et les paysans

Monsieur le Président,

A quelques heures de la signature de l'Accord Final entre le Gouvernement que vous présidez et les Forces Armées Révolutionnaires de Colombie FARC-EP, la douleur et l'indignation nous ont obligé à vous adresser cette lettre publique. Pour que vous aussi, publiquement, soyez clair et affirmiez votre position et votre engagement, non pas avec les FARC, mais avec le peuple colombien en général, à propos du "Plan Pistola" qui se développe contre les dirigeants populaires dans tout le pays.

La situation est dramatique et très préoccupante : plus de deux cents morts cette année, sous couvert d'une impunité totale. Un nouveau génocide est en marche contre les leaders sociaux et les paysans. Voici ce qui s'est passé cette semaine :
  • Attentat contre Argemiro Lara de FENSUAGRO à Sincelejo
  • Assassinat de Erley Monroy, dirigeant de ASCAL-G à San Vincente del Caguán dans le Caquetá.
  • Attentat contre Danilo Bolaños, leader de ASTRACAN dans le Nariño, alors qu'il allait participer à un Cabildo pour la Paix.
  • Assassinat de Didier Losada Barreto, dirigeant paysan à San Juan de Losada, zone de San Vicente del Caguán.
  • Attentat contre Victor Hugo Cuéllar à San Vicente del Caguán, dans le Caquetá.
  • Rodrigo Cabrera, le frère du leader des victimes de Policarpa, dans le Nariño, vient d'être assassiné
La situation est gravissime puisque ces dernières 48 heures, il y a eu 3 morts et 2 attentats.
Monsieur le Président, il est de notoriété publique que ceux qui sont derrière ces assassinats sélectifs et politiques, sont ceux-là mêmes qui ont récolté argent, pouvoir et privilèges grâce à la guerre fratricide qui a ensanglanté le pays depuis plus de 52 ans. Ce sont ceux-là mêmes pour qui il n'y a pas, il n'y aura aucun accord de paix satisfaisant, quoi que l'on fasse, car ils veulent que la guerre se poursuive pour continuer à récolter plus de privilèges et de pouvoir.

La Colombie entière se souvient que, dans un acte courageux, vous avez reconnu la culpabilité de l'Etat dans l'extermination de plus de 5.000 leaders de l'Union Patriotique. C'est un pas important dans le processus de réparation. Mais s'il y a une détermination à en finir avec la guerre sale, personne ne s'explique pourquoi les décisions qui peuvent effectivement désarticuler le para-militarisme ne sont pas prises.

Il n'est pas admissible que sous le rideau de fumée des noms comme "Les Usuga" ou les "Aigles Noirs", on cache la responsabilité de certaines personnalités tapies dans le Bloc du Pouvoir Dominant.

Juste un instant, monsieur le Président, faites l'exercice de vous mettre à la place des organisations sociales qui sont victimes, ou à notre place, et demandez-vous : Quelle serait votre attitude face à ce fleuve de sang qui menace de détruire le processus de paix dans lequel nous avançons ? Et que feriez-vous face à la violation récente du cessez-le-feu qui a produit la mort de deux guérilléros dans la région du Sud Bolívar ?

Si vous êtes engagés pour la paix en Colombie, agissez en conséquence en mettant un point final à cette extermination d'innocents dont le péché semble être leur pensée critique et leur vision d'un nouveau pays, et mettez dès maintenant en oeuvre l'accord sur les garanties de sécurité.

Secrétariat de l'Etat Major Central des FARC-EP



lundi 21 novembre 2016

Colombie : SOS, la paix en danger


Entretien avec Carlos Lozano Guillén
 
« Il y a une urgence de l’unité et de la mobilisation populaire pour mettre en œuvre les accords de paix et éviter un nouveau bain de sang ». 

Eliécer Jiménez Julio. 20/11/2016

Dans un entretien pour tercerainformacion.es, Carlos Lozano Guillén, journaliste et dirigeant politique du Parti Communiste Colombien a souligné que le nouvel accord de paix signé entre le gouvernement colombien et les FARC-EP est définitif et qu’il est très important pour la paix et le futur de la Colombie puisqu’il conserve l’esprit et la structure du précédent accord. Ce qui importe maintenant, c’est la ratification de l’accord, qui aura vraisemblablement lieu au Congrès. Et c’est au mouvement social démocratique, par la mobilisation, qu’il correspond d’en défendre la mise en œuvre de manière unitaire afin d’éviter les « entourloupes » du gouvernement et de ne pas permettre que l’administration de l’accord ne reste qu’entre les mains de ceux-là même qui ont mal gouverné le pays. Il a également lancé un SOS à la communauté internationale en l’invitant à visiter la Colombie, à accompagner les processus et éviter un deuxième génocide politique comme celui de l’Union Patriotique. Il a souligné que la paix est en danger à cause de l’offensive de l’extrême droite et des paramilitaires qui, en complicité avec certains secteurs des forces armées, à travers les exécutions de guérilléros (1), les attentats contre les dirigeants régionaux et les menaces qui ont eu lieu ces derniers jours dans le sud et l’ouest du pays, font craindre un nouveau bain de sang en Colombie (2). 

Carlos Lozano Guillén, qui est membre du Comité Exécutif Central du Parti Communiste Colombien, directeur du journal VOZ et qui a consacré sa vie à la lutte populaire, particulièrement en accompagnant les différents processus de paix en Colombie, a indiqué que « malgré le revers du plébiscite et la nécessité de sauver la paix, il a fallu renégocier à nouveau sur la base de la structure et de l’esprit de l’accord précédent, en acceptant certaines des propositions, recommandations et initiatives de ceux qui ont défendu le « Non », des secteurs de l’extrême-droite et des ennemis de la paix en Colombie. Il était inévitable de les prendre en compte ». 

Impulser la mise en œuvre et être vigilants pour éviter les « entourloupes » du gouvernement 

« Je crois que l’accord original était meilleur, mais ce deuxième accord n’est pas négatif, bien qu’il fragilise certains aspects essentiels du précédent. Il a fallu en passer par là, car c’était inévitable pour sauver la paix. Aujourd’hui, nous avons un accord qui tient bon, un accord définitif, comme l’a exprimé le gouvernement et la guérilla des FARC-EP, et maintenant le président Santos s’apprête à le porter au congrès si c’est ce qui est finalement accordé avec les FARC, afin qu’il soit ratifié sans modification pour entrer dans la phase de mise en œuvre » a affirmé le dirigeant communiste. 

« Je crois que nous marchons sur un terrain solide en ce qui concerne l’accord, même s’il y a une grande préoccupation face au harcèlement et aux provocations des ennemis de la paix en Colombie. A propos de l’accord, nous traversons un bon moment, je crois qu’il y a une satisfaction des différents secteurs démocratiques du pays. Nous sommes conscients que ce sont des pas nécessaires et indispensables pour avancer sur le chemin de la paix. Il importe maintenant que le mouvement social, démocratique, et les amis de la paix, renforcent la lutte pour que la mise en œuvre se fasse le plus rapidement possible, en respectant chacun des engagements assumés par le gouvernement national qui a souscrit l’accord. Il faut évidemment éviter que se présentent les manquements et les « entourloupes » habituelles par lesquels la classe dominante a toujours répondu à ce type d’accord pour les fragiliser, les modifier et faire dévier leur colonne vertébrale et le sens constructif qu’ils portent » a rappelé Lozano Guillén qui fait également partie du Front Elargi pour la Paix. 

Le rôle de la gauche et du peuple colombien après la signature de la paix 

Le directeur du journal VOZ, hebdomadaire du PCC a affirmé dans son dialogue avec tercerainformacion.es (média alternatif espagnol) que « ce qui est le plus important, ce qui est l’unique chemin, c’est l’unité, la mobilisation, la veille sur la mise en œuvre des accords et leur respect. Il n’y a que la mobilisation sociale, les amis de la paix, ceux qui ont été attentifs à tout cela, le Front élargi pour la Paix, toutes les organisations sociales et populaires qui se sont présentées à La Havane (Cuba), qui ont toujours soutenu le processus de dialogue et de paix et qui se sont engagées dans son développement ». 

Lozano a souligné que : « Le plus important, c’est l’unité, et à plus long terme, l’unité des forces de gauche et des forces démocratiques. Nous devons être conscients qu’il y a là un impératif, c’est aujourd’hui un défi historique pour la gauche, parce qu’il serait inadmissible que le post-accord soit administré par ceux-là même qui ont gouverné ce pays, les mêmes qui ont maintenu le statu quo, qui défendent leurs privilèges, qui continuent à faire avancer toute cette politique néolibérale qui favorise le grand capital, les intérêts des multinationales et qui sont contraires aux solutions sociales et populaires. C’est la raison pour laquelle il faut ouvrir la possibilité d’un nouveau pouvoir populaire et démocratique, de la gauche et des secteurs dévastés du pays. Car, évidemment, ces accords n’impliquent pas la transformation définitive de la société, ce sont des accords importants que renforcent la démocratie, qui engendrent de meilleures conditions sociales, mais qui ne résolvent pas les problèmes structurels de la Colombie : Cela, c’est nous qui devons le faire, nous les gens de gauche et les démocrates, sur la base de la remise en perspective nationale d’un nouveau pouvoir. Ce sont des tâches que nous devons assumer, surtout au moment où nous recevons cette offensive des provocations de ceux qui sont les ennemis de la paix, qui, au fond, veulent empêcher la paix stable et durable ». 

Face aux exécutions, aux assassinats et à l’offensive paramilitaire : Mobilisation populaire, dénonciation nationale et internationale 

Consulté sur la situation de violence et l’assaut paramilitaire contre les leaders de gauche, particulièrement dans le sud et l’ouest de la Colombie ces derniers jours, la réponse est catégorique : « C’est vrai, cela vient de ceux qui veulent empêcher la mise en œuvre des accords, ce sont des actions délirantes, désespérées, des actions de l’extrême droite, du para-militarisme, des ennemis de la paix, et même de certains cadres militaires qui mettent en danger la trêve et le cessez-le-feu bilatéral et définitif. Deux combattants des FARC ont été assassinés de manière infâme et présentés comme tombés au front, au cours d’un combat qui n’a jamais existé. Tous les témoins coïncident sur le fait que ce fut un assassinat, c’est une exécution qui a eu lieu. Il y a une enquête de la commission tripartite Gouvernement / ONU / FARC sur tout cela et il y aura une prise de parole sur tout cela. Ce sont des faits graves ». 

La paix en danger… Un processus de génocide contre la Marche Patriotique (3) 

Il y a également l’action persistante et démente de ceux qui agissent contre les militants de la défense des droits humains dans le sud du pays, majoritairement, membres de la Marche Patriotique, mouvement de gauche dont 123 membres ont été assassinés ces quatre dernières années. Si nous ne prenons pas garde à cela, si nous ne le rejetons pas, s’il n’y a pas une prise de parole claire de la communauté internationale, une décision catégorique du gouvernement, cela peut s’étendre à d’autres parties du pays et nous pouvons assister à un nouveau génocide de la gauche comme celui qui avait eu lieu avec l’Union Patriotique. Nous devons éviter cela, nous mobiliser en amont, avec fermeté, tranquillité et sérénité, mais en affrontant cette situation par l’action massive, la mobilisation populaire, en exigeant du gouvernement qu’il respecte toutes les mesures pour lesquelles il s’est engagé, et pour qu’il n’y ait aucune sorte de complicité entre les autorités et ceux qui commettent ce type de crimes et d’assassinats contre l’humanité. 

Nous avons besoin d’accompagnement international pour empêcher un nouveau bain de sang en Colombie 

L’appel à la communauté internationale est un appel à la solidarité, au soutien, à s’unir à cette clameur pour la paix en Colombie. Nous avons pu compter sur la solidarité, pas seulement des organisations sœurs et amies à l’étranger, mais aussi sur des gouvernements qui ont soutenu l’effort qui se fait ici en Colombie. Nous voulons donc que cette solidarité se maintienne avec force, nous avons besoin que des délégations viennent accompagner les processus ici dans le pays. Que de l’étranger, on exige aussi le respect des accords et que soient prises des mesures pour empêcher que le bain de sang en Colombie ne continue ». 

Finalment, Carlos Lozano a envoyé un message aux colombiens qui vivent à l’extérieur du pays : « Pour les exilés et les politiques poursuivis par l’Etat colombien (qui se réuniront ce 26 novembre à Madrid, en Espagne) (4), pour les migrants colombiens : Recevez un message d’optimisme, d’espoir. Nous avançons par le chemin de la paix stable et durable, et ici en Colombie, nous vous attendons pour que, avançant dans tout cela, quand il y aura de meilleures conditions de vie, une nouvelle démocratie, plus de possibilités sociales dans le pays, tous ensemble, d’ici et de l’extérieur, unis et réunis, nous puissions construire un nouveau pays, une nouvelle société, une nouvelle Colombie, prospère, démocratique, avec une meilleure justice sociale". C’est ainsi que se concluait l’entretien avec Carlos Lozano Guillén du Comité Central du Parti Communiste Colombien. 

(1). http://prensarural.org/spip/spip.php?article20527
(2). http://www.pacocol.org/index.php?option=com_content&view=article&id=19561:van-123-miembros-de-marcha-patriotica-asesinados-en-cuatro-anos&catid=86&Itemid=472
(3).http://caracol.com.co/radio/2016/11/20/nacional/1479666101_893235.html
(4).http://exiliadaspoliticascolombianas.tumblr.com/post/153172374189/reuni%C3%B3n-extraordinaria

vendredi 18 novembre 2016

Colombie. Préambule de l'Accord Final du 12 novembre 2016



ACCORD FINAL POUR LA CESSATION DU CONFLIT
ET LA CONSTRUCTION D'UNE PAIX STABLE ET DURABLE

PREAMBULE 

Rappelant que les dialogues de La Havane entre les délégué-e-s du Gouvernement National dirigé par le Président Juan Manuel Santos et les délégué-e-s des Forces Armées Révolutionnaires de Colombie - Armée du Peuple, ont commencé suite au résultat de la Rencontre Exploratoire qui avait eu lieu dans la capitale de la République de Cuba entre le 23 février et le 26 août 2012, avec la décision mutuelle de mettre fin au conflit armé national, 

Estimant que, les dialogues exploratoires mentionnés précédemment ont amené à produire un Accord Général pour la Cessation du Conflit et la Construction d'une Paix Stable et Durable, signé le 26 août 2012 en présence de témoins nationaux et de délégués de la République de Cuba et du Royaume de Norvège qui prirent également la qualité de témoins et qui, depuis, accompagnent le processus en tant que pays garants, 

Soulignant que la République Bolivarienne du Venezuela et la République du Chili ont offert à tout moment leurs bons offices comme pays accompagnateurs,

Rappelant que, pour développer l'agenda approuvé dans l'Accord ci-dessus, la Table des Conversations a été installée le 18 octobre 2012, dans la ville d'Oslo, capitale du Royaume de Norvège, pour ensuite continuer ses activités dans la capitale cubaine, sans interruption, jusqu'à la célébration de l'acte de signature du nouvel Accord Final,

Considérant qu'en conséquence de ce qui a été mentionné ci-dessus, les parties ont souscrit le 24 août de l'année en cours un Accord Final pour la Cessation du Conflit et la Construction d'une Paix Stable et Durable, que cet accord a fait l'objet d'une consultation du peuple dans le cadre d'un plébiscite accepté à ce moment là par les parties, à une date établie pour ce faire (le 2 octobre dernier) dans une sentence proférée par le Conseil Constitutionnel qui a indiqué au pays les termes et les conditions du chemin choisi, 

Reconnaissant que le verdict des urnes a fait peser la prévalence du NON sur le OUI, sans que cela ne signifie un rejet du droit à la paix ni aux droits fondamentaux,

Soulignant que la sentence de la Cour Constitutionnelle mentionnée ci-dessus a elle-même présenté la démarche à suivre au cas où le NON serait la réponse majoritaire de la journée du plébiscite ;  Que cette sentence de la Haute Cour indique que les compétences du Président de la République sont maintenues pour préserver l'ordre public, "même à travers la négociation avec des groupes armés illégaux, cherchant à atteindre d'autres accords de paix", 

Faisant valoir la décision des parties de poursuivre la recherche de paix, en écoutant auparavant ceux qui ont manifesté leurs réserves sur des contenus de l'Accord Final signé en première instance, avec l'ambition d'arriver à un nouvel accord plus consensuel ; Que cela a permis d'enrichir et de modifier l'Accord antérieur, en prenant en compte les inquiétudes et les propositions, les éclaircissements et les définitions précises énoncées par les groupes et organisations sociales, les secteurs d'opinion, les mouvements et les partis politiques les plus divers ; Qu'après avoir étudier sans préjugés et avec une grande attention tout ce qui a été porté à l'attention des parties négociatrices par les intéressés, des changements nombreux et importants et de substantielles modifications ont été apportés à l'Accord de Paix antérieur dans un nouvel Accord Final pour la Cessation du Conflit et la Construction d'une Paix Stable et Durable,

Soulignant que le nouvel Accord Final souscrit à cette date correspond à la libre manifestation de la volonté du Gouvernement National et des FARC-EP - en ayant dûment pris en compte les diverses initiatives du peuple de Colombie-, en oeuvrant de bonne foi, et avec la pleine intention de respecter ce qui a été accordé, 

Ayant à l'esprit que l'Article 22 de la Constitution Politique de la République de Colombie impose la paix comme un droit et un devoir qui ont force exécutoire ; que l'Article 95 affirme que l'exercice des droits et des libertés reconnus dans la Constitution implique des responsabilités dont celle de promouvoir la réussite et le maintien de la paix,

Soulignant que la paix est qualifiée universellement comme un droit humain supérieur, requis pour l'exercice de tous les autres droites et devoirs des personnes et du citoyen, 

Ayant à l'esprit que le nouvel Accord Final reprend tous et chacun des accords atteints pour développer l'agenda de l'Accord Général souscrit à La Havane en août 2012 ; et que pour y arriver, les parties ont constamment et à chaque instant respecté l'esprit et la portée des normes de la Constitution Nationale, des principes du Droit International, du Droit International des Droits Humains, du Droit International Humanitaires (Conventions et Protocoles), de ce qui est ordonné par le Statut de Rome (Droit Pénal International), des jugements proférés par la Cour Interaméricaine des Droits Humains relatifs aux conflits et à leur cessation, et des autres sentences de compétences reconnues universellement et autres déclarations qui font autorité en la matière,

Considérant que les droits et les devoirs consacrés dans la Charte sont interprétés en conformité avec les traités internationaux sur les droits humains ratifiés par la Colombie, sans que leur jouissance ou leur exercice puissent être objet de limitation,

Rappelant que l'Article 94 manifeste que "l'énonciation des droits et des garanties contenus dans la Constitution et dans les conventions internationales en vigueur ne doivent pas être compris comme une négation des autres droits qui, inhérents à la personne humaine, n'y figurent pas expressément",
 
Considérant que la somme des accords qui conforment le nouvel Accord Final contribuent à la satisfaction des droits fondamentaux que sont les droits politiques, sociaux, économiques et culturels ; les droits des victimes du conflit à la vérité, la justice et la réparation ; le droit des enfants et adolescents, filles et garçons ; le droit de liberté de culte et de son libre exercice ; le droit fondamental à la sécurité juridique individuelle et/ou collective et à la sécurité physique ; et le droit fondamental de chaque individu et de la société à ne pas souffrir la répétition de la tragédie du conflit armé interne que l'on propose de dépasser définitivement avec le présent accord,

Soulignant que le nouvel Accord Final prête une attention spéciale aux droits fondamentaux des femmes, des groupes sociaux vulnérables tels que les peuples indigènes, les enfants et adolescents filles et garçons, les communautés afro-descendantes et les autres groupes ethniquement différenciés ; aux droits fondamentaux des paysans et paysannes et aux droits essentiels des personnes porteuses d'un handicap et des déplacés à cause du conflit ; aux droits fondamentaux des personnes âgées et de la population LGBTI,

Relevant que, pour développer ce qui a été souligné précédemment, dans le respect de l'article 13 de l'article 13 de la Constitution Politique de Colombie, l'Etat doit garantir le droit à l'égalité et à la non-discrimination dans ses différentes dimensions ; qu'il doit s'efforcer à ce que soient réunies les conditions qui permettent la protection efficace des personnes qui se trouvent dans une fragilité manifeste et la sanction des abus qui sont commises contre elles,

Insistant sur le fait que, selon le Gouvernement National, les transformations auxquelles on doit parvenir en mettant en oeuvre le présent Accord doivent contribuer à dissiper les effets du conflit et à changer les conditions qui ont facilité la persistance de la violence dans le territoire ; et que selon les FARC-EP, ces transformations doivent contribuer à résoudre les causes historiques du conflit, comme la question non résolue de la propriété de la terre et particulièrement sa concentration, l'exclusion des paysans et le retard des communautés rurales, qui affecte spécialement les femmes et les enfants,

Mettant en exergue que l'axe central de la paix est d'impulser la présence et l'action efficace de l'Etat dans tout le territoire national, spécialement dans de multiples régions sinistrées par l'abandon, la carence d'une fonction publique efficace, et par les effets du conflit armé interne lui-même ; que l'objectif essentiel de la réconciliation nationale est la construction d'un nouveau paradigme de développement et de bien-être territorial dans l'intérêt de larges secteurs de la population jusqu'à maintenant victime de l'exclusion et du désespoir,

Reconnaissant les droits de la société à une sécurité humaine intégrale avec la participation des autorités civiles,

Mettant en exergue et consacrant la justice prospective quand elle reconnait les droits fondamentaux essentiels pour les nouvelles et les futures générations, tels que le droit à une terre conservée, le droit à la préservation de l'espèce humaine, le droit à connaitre son origine et son identité, le droit à connaitre la vérité sur les faits qui ont eu lieu avant sa naissance, le droit à l'exemption des responsabilités pour les actes commis par les générations précédentes, le droit à la préservation de la liberté d'option, et d'autres droits, sans préjudice sur les droits des victimes de tout âge et de toute génération à la vérité, à la justice et à la réparation,

Attentifs à ce que la nouvelle vision d'une Colombie en paix permette d'atteindre une société durable, unie dans la diversité, fondée non seulement sur le culte des droits humains mais aussi sur la tolérance mutuelle, la protection de l'environnement, le respect de la nature, de ses ressources renouvelables et non renouvelables, et sa biodiversité,

Rappelant que le 23 juin dernier de l'année en cours, les délégations du Gouvernement National et des FARC-EP ont souscrit dans la capitale cubaine les accords de Cessation des Hostilités et de Cessez-le-Feu Bilatéral et Définitif, de Dépôt des Armes et de Garanties de Sécurité, en présence du Président des Conseils d'Etat et de Ministres de la République de Cuba, du Secrétaire Général des Nations Unies, du Président de l'Assemblée Générale de l'ONU, du Président du Conseil de Sécurité de cette organisation, du Ministre des Relations Extérieures du Royaume de Norvège, des Chefs d'Etat des pays accompagnants, des Chefs de Gouvernement des pays de la région, de l'Envoyé Spécial des Etats-Unis d'Amérique et du Représentant Spécial de l'Union Européenne ; Que la cessation des hostilités a continué depuis la date de réalisation du plébiscite du 2 octobre dernier,

Acceptant que les normes du droit international coutumier continueront à régir les questions liées aux droits fondamentaux non mentionnés dans le nouvel Accord Final, avec le mandat impératif qui ordonne que "dans les cas non prévu par le droit en vigueur, la personne humaine est sauvegardée par les principes d'humanité et les exigences de la conscience publique",

Admettant que le nouvel Accord Final pour la Cessation du Conflit et la Construction d'une Paix Stable et Durable doit faire l'objet d'une ratification, conformément au point 6 de l'agenda de l'Accord Général ; Que cette ratification peut être effectuée à travers des systèmes de participation citoyenne comme le plébiscite, l'initiative législative, la consultation, le "cabildo abierto" et autres, ou par des corporations publiques élues dont les membres chargés de représentation par mandat, tels que le Congrès de la République, les assemblées départementales et les conseils municipaux ; que cette ratification est décidée par les parties et qu'elle devra se faire avec les normes pertinentes ou les sentences qui la décrivent,

Reconnaissant tout ce qui a été précédemment énoncé et en particulier, le mandat constitutionnel non délégable qui dicte que c'est au Président de la République, en tant que Chef d'Etat, Chef du Gouvernement et Autorité Administrative Suprême qu'il correspond de convenir et de ratifier les accords de paix ; 

Le Gouvernement de la République de Colombie et les Forces Armées Révolutionnaires de Colombie - Armée du Peuple, ont accordé de :
Souscrire le présent Accord Final pour la Cessation du Conflit et la Construction d'une Paix Stable et Durable, avec les modifications substantielles qui font du même accord, un nouvel Accord, dont l'exécution mettra fin de manière définitive à un conflit armé de plus de cinquante ans et qui est inscrit ci-dessous.  

Le présent Accord Final pour la Cessation du Conflit et la Construction d'une Paix Stable et Durable est souscrit par le Gouvernement National et les Forces Armées Révolutionnaires de Colombie - Armée du Peuple, comme Accord Spécial dans les termes de l'article 3 commun aux conventions de Genève de 1949, entrant en vigueur au plan international.

Le Gouvernement National et les Forces Armées Révolutionnaires de Colombie - Armée du Peuple (FARCEP) signent sept originaux incluant leurs annexes, un pour chacune des parties, un pour chacun des pays garants et un pour chacun des pays accompagnants. Le septième exemplaire original sera immédiatement déposé après sa signature, devant le Conseil Fédéral Suisse à Berne ou devant l'organisme qui le remplacera dans le futur comme dépositaire des Conventions de Genève.






mardi 8 novembre 2016

Colombie : Oui à un pacte politique national des bases, et non des élites

 

"Après une guerre contre-insurrectionnelle de 68 ans contre plusieurs générations de rebelles invaincus et alors qu'une solution politique est d'ores et déjà accordée, les ultras cherchent à éterniser le système politique excluant qui justifia la rébellion, et à forcer une victoire de dernière heure qui oriente les résultats de quatre ans de négociations complexes et d'accords soutenus par la communauté mondiale vers l'impunité en faveur de leurs complices." (Déclaration du Comité Exécutif du Parti Communiste Colombien, le 3 octobre 2016).

En Colombie, de nombreuses interprétations circulent au plan national sur la situation complexe du pays. Certaines sont partagées sans critique par les alliés et les secteurs de la gauche. Il faut reconnaitre que l'effet provoqué par le résultat du 2 octobre a mis en évidence deux réalités camouflées par le cours incessant des événements : D'une part, une énorme avancée dans la conscience des couches populaires et moyennes que l'idée de la fin de la guerre est liée à la démocratisation du pays et à la nécessité d'importantes réformes sociales, politiques, économiques et culturelles ; et d'autre part, cela a poussé au rouge vif la crise du régime politique et l'incapacité de la fraction gouvernementale à conduire jusqu'à ses pleines conséquences, un accord de paix qui a posé les bases d'un nouvel engagement historique, avec pour point de départ, un paysage de libertés, de droits et de garanties en rupture avec l'ordre contre-insurrectionnel hérité du bipartisme. Etablir si possible le sens de ce qui est en train de se passer et montrer les lignes qui caractérisent notre politique dans la conjoncture actuelle est la tâche du 22ème Congrès. Le plenum préparatoire prévu les 3 et 4 décembre devra actualiser les Thèses et centrer ses conclusions sur la perspective politique que doit étudier et décider le Congrès.


A propos de la menace d'un nouveau "front national"

La crise provoquée par le résultat du 2 octobre ne s'explique que par l'entêtement du gouvernement à réaliser un plébiscite, sans préparation ni pédagogie suffisante, et sa tendance manifeste à faire des concessions à la droite ultra. Sous prétexte de la défaite électorale, une nouvelle offensive stratégique de l'uribisme s'est mise en route afin de méconnaitre l'Accord de paix déjà souscrit, à travers la déstabilisation médiatique, l'essai d'imposer un pacte des élites et la perspective d'un gouvernement réactionnaire (Vargas Lleras - Uribe) en 2018, pour un démantèlement futur des accords.

Uribe sait que ses propositions "originales" au nom du NON coïncident en grande partie avec celles du gouvernement au début des dialogues. La prétention d'un pacte des élites s'appuie sur la coïncidence des intérêts de classe, pour mettre en morceaux l'engagement signé le 26 septembre, s'appuyer sur le modèle implicite des Zidres et soutenir la réforme fiscale régressive. En arriver là, signifierait la fin de toute idée de solution politique. Pourtant, la solution humaine à une longue guerre, à travers le dialogue et des engagements mutuels, est quelque chose que la bourgeoisie a dû accepter, parce que cela sert aussi son intérêt de classe. Le fond de la crise politique, ouverte par l'avantage du Non dans le plébiscite réside dans le fait de trancher si oui ou non, l'Accord est consolidé, c'est à dire : Redéfinir et normatiser sa mise en oeuvre, préserver le cessez-le-feu bilatéral et définitif, l'amnistie, la grâce et le dépôt des armes, la normalisation et la réincorporation des ex-combattants, dans un cadre de garanties, respect de la vie, intégrité, dignité et suivi par le Mécanisme Tripartite (ONU, Farc, gouvernement). Mais il consiste aussi à sécuriser les victimes, les personnes menacées ou poursuivies, les prisonniers politiques et les membres de la gauche sociale et politique, et parmi eux les membres du nouveau mouvement ou parti qui surgira des accords, en leur assurant la liberté, la protection, la vérité et la réparation complètes. Tout cela ne peut pas dépendre des bonnes dispositions de la bureaucratie gouvernante, mais de l'unité, l'organisation, la revendication, la mobilisation des forces populaires qui plaident légitimement pour la défense, l'explication, la pédagogie et le respect des accords.


La très dure bataille pour la démocratisation du pays

La défense de l'Accord de paix, l'exigence d'une nouvelle procédure pour sa mise en oeuvre sont le centre de la bataille d'idée de la conjoncture actuelle. L'absence d'une réelle pédagogie sur la paix continue à être palpable. C'est la gauche politique et sociale, en lien avec les nouvelles réserves démocratiques qui ont répondu à l'appel du moment en cours, qui émergent en défense de l'Accord, qui réfutent avec des arguments la position uribiste, qui mènent le débat sur l'approche de genre et ont mis en évidence le mélange mal intentionné avec un prétexte religieux et inquisitoire pour invalider ce qui avait été accordé. Dans le débat idéologique sur la défense et l'évaluation du sens profond de l'Accord, se joue le contenu démocratique de la paix et de ses potentialités transformatrices : la Justice Spéciale pour la Paix, l'éligibilité et les garanties politiques des ex-combattants, le Statut de l'opposition, la réforme du système des partis et les coalitions pour les listes, la réforme du système électoral, les circonscriptions territoriales de paix, etc. Une des exigences du camp populaire est la formalisation de la Commission Nationale des Garanties, la fin du Paramilitarisme et la Non répétition, axe fondamental de l'Accord.

Le sondage Gallup de la dernière semaine d'octobre montre que persiste la tendance qui s'est manifestée par un vote négatif de punition au pouvoir. Malgré le prix Nobel, qui est un soutien de la bourgeoisie transnationale à un président aux abois, l'image défavorable de Santos atteint 60% et la favorable n'est que de 34%. Entre temps, le soutien au processus de solution politique continue à avancer. 77% des personnes interrogées approuvent la voie du dialogue et les accords, alors qu'il n'y en a que 19% pour la solution militaire. 80% des personnes interrogées sont favorables au dialogue avec l'ELN. Fait significatif : l'image positive des FARC-EP passe de 11 à 18 % entre août et octobre. Il y a des changements qui transforment la conscience sociale. De nouvelles perceptions surgissent, avec les expressions d'un nouveau sens commun qui commence à rompre la polarisation va-t-en guerre manichéenne avec laquelle la droite avait édifié son hégémonie liée à la guerre contre-insurrectionnelle.


Le pouvoir ne semble pas comprendre le sens de ce qui se passe

Malgré ces données, le gouvernement persiste dans une réforme fiscale régressive qui rajoute du rejet à sa politique de nouveaux impôts. La rupture du dialogue de la Table commune avec le Sommet rural, indigène et populaire rappelle qu'il y a des luttes et des protestations en cours, qu'il y aura une Caravane des femmes qui arrivera à Bogotá le 14 novembre au matin, qui participera à diverses activités puis retournera dans les régions la nuit du mardi 15 novembre. Le 17 novembre, se prépare la manifestation nationale contre la réforme fiscale. Les 29 et 30 novembre, est prévue le Sommet National pour la Paix, point de rencontre, de mobilisation et d'appel à une grande Vigile Nationale pour la Paix.

Le fait le plus important, avec une profonde valeur prédictive et qui peut guider l'activité des révolutionnaires,  a été la réponse du mouvement populaire, et en particulier de la jeunesse, dans des formes très diverses d'agitation, publicités, campements, vigiles, utilisation des réseaux, visites aux PPT (Points de pré-regroupement temporaires des guérrilléros) en soutien à l'Accord, pour accélérer sa mise en oeuvre, veiller au respect du cessez-le-feu, bilatéral, les garanties à la vie, à la sécurité pour l'activité politique. C'est soutenus par cette dynamique réelle que doivent se déployer à fond toute l'initiative, la coordination et les tâches du Parti, en lien avec l'Union Patriotique, la Marche Patriotique, les organisations de jeunesse et les organisations étudiantes, dans le cadre de la vision du Front Elargi.

Quelques propositions qui naissent des initiatives en cours :

1. Nous devons soutenir, stimuler et contribuer au maintien et à la vigueur de l'agitation, l'organisation et l'initiative UNITAIRES de la lutte populaire et de la jeunesse jusqu'à ce que soit concrétisé et ratifié par une nouvelle signature l'Accord définitif, avec ses avenants et protocoles.

2. Nous proposons d'impulser un pacte politique national des bases, et non des élites, comme le formule le point 3.4 des Garanties de l'Accord (Non aux armes en politique, non au paramilitarisme, non au terrorisme d'Etat, non à la "doctrine de la sécurité nationale") et l'engagement de NON REPETITION.

3.  Les "cabildos abiertos" (conseils ouverts) sont une forme de démocratie directe reconnue par la Constitution (Art. 103). Leur réglementation par la Loi 134 est compliquée mais pas irréalisable. Ils ont lieu dans plusieurs Municipalités et Communes, avec ou sans permission. Ce sont essentiellement des espaces délibératifs, de convergence populaire et pédagogiques sur l'essentiel des processus de paix. Avec l'initiative des masses, ils peuvent prendre vie, réanimer les territoires, construire l'unité et le pouvoir à partir des bases. Si la forme de ratification légale de l'Accord doit surgir de la Table de La Havane, nous pensons que la légitimation réelle des masses devrait passer par les "cabildos abiertos". Le vivre ensemble se construit de bas en haut, pas seulement à partir de la bureaucratie de l'Etat. C'est ainsi que l'Accord envisage le pacte politique national. Il y a aussi la proposition de recueillir 10 millions de signatures. De la même manière, de futurs processus constituants sont envisagés. Nous croyons qu'il est sensé d'ouvrir cette discussion dans les bases. L'irréversibilité des Accords ne se résout pas seulement en Suisse, elle peut avoir ici dans le territoire son plus grand ancrage (Il y a 1122 municipalités, dont 5 districts spéciaux).

4. Proposer les "étrennes pour la Paix", pour recueillir des victuailles et de la logistique non périssable pour les campements en soutien à la paix et pour les Vigiles dans les PPT (Points de Pré-regroupement Temporaires). C'est important dans le soutien au Cessez-le-Feu bilatéral et définitif.

5. Penser à un futur Congrès National des Cabildos, dans l'esprit pré-constituant.

Département Politique
Comité Exécutif
Parti Communiste Colombien