mercredi 27 décembre 2017

Evo Morales Ayma : Le temps s'achève pour nous


Discours de Evo Morales Ayma, 
Président de l'Etat Plurinational de Bolivie
Source : http://www.cancilleria.gob.bo/webmre/node/2361

Paris, 12 décembre 2017

Frères et soeurs de la presse,

Nous sommes à Paris en réponse à l'invitation du président Emmanuel Macron, du Secrétaire Général des Nations Unies, Antonio Gutierrez et d'autres organismes internationaux. Je profite de cette opportunité pour faire connaitre la position bolivienne sur ce Sommet de la Planète, qui représente un sommet pour la vie, pour l'humanité. Je salue le grand effort du président français qui, au nom de la France, au nom de la vie, nous a appelé, nous les présidents, les organismes internationaux, les experts qui étudient la vie, et particulièrement le futur des générations à venir.

Le temps s'achève pour nous. Alors que nous parlons, ouragans, tremblements de terres, inondations, sécheresses, pollution de l'air, pollution de nos océans et extinction des espèces qui en découlent, sont les conséquences directes du système actuel de production, de consommation et d'industrialisation sans mesure.

Frères et soeurs, le temps s'achève pour nous. Les 5 dernières années ont été les plus chaudes enregistrées dans l'histoire. Les concentrations de gaz à effet de serre continuent à augmenter. Le niveau de la mer continue à monter, les lagunes, les fleuves et leurs affluents sont en train de sécher. Au niveau global, la chaleur des océans atteint une température record.

La glace des deux pôles de la planète est en dessous de sa taille moyenne et nos cordillères perdent leurs couvertures blanches. Le temps s'achève pour nous. Les phénomènes extrêmes sont devenus le plus grand risque pour l'humanité en matière de santé, d'accès à l'eau et aux services de base.

Cette situation aggrave considérablement la crise humanitaire que vit l'Afrique et le Moyen Orient. Dans ma région, l'Amérique Latine et des Caraïbes, les derniers ouragans qui se sont abattus sur la Dominique, Antigua et Barbuda ont provoqué des dégâts qui atteignent 1.100 millions de dollars.

Nous devons attaquer les causes structurelles du changement climatique. Démonter le système de production qui ne se développe pas en harmonie avec la nature, modifier les modèles et la culture de la consommation sans fin, rénover notre relation avec la Mère Terre, en reconnaissant et en respectant ses droits.

Les pays qui ont plus de responsabilité historique sur les dommages à la Mère Terre doivent assumer un plus grand engagement réel et réaliser de plus gros apports.

Nous, les pays du Sud, qui étions avant des colonies et dont les ressources naturelles sont encore exploitées sans une juste rétribution, nous sommes ceux qui souffrons le plus des effets du changement climatique. Par ailleurs, nous sommes les pays qui apportons le plus en matière de réduction des gaz à effet de serre.

La Bolivie génère à peine 0.1% des gaz à effet de serre. Avec les arbres de notre Amazonie, nous capturons et nous nettoyons 2% mondial du dioxyde de carbone polluant. C'est à dire que nous apportons au monde 2% de l'oxygène de notre planète. Nous avons une équation environnementale positive, parce que nous émettons peu de gaz à effet de serre et que nous nettoyons ces gaz. Ainsi nous apportons au monde 20 fois plus d'oxygène que ce que nous polluons.

Pourtant, notre population souffre des terribles sécheresses ou inondations qui affectent sa vie quotidienne. Malgré ces difficultés, la Bolivie a investi ces dernières années plus de 1.600 millions de dollars en projets d'accès à l'eau, accomplissant ainsi les objectifs du millénaire. De plus, nous investissons maintenant 2.600 millions de dollars en diversification de nos sources d'énergie électrique avec des sources d'énergie alternatives et renouvelables.

Frères et soeurs de la presse,

Nous, les pays du Sud, nous sommes les gardiens de la Convention sur le Changement Climatique. Deux ans après la célébration de l'Accord de Paris, nous sommes à nouveau réunis, et nous débattons à nouveau sur les mêmes problèmes de blocage des financements pour une lutte efficace contre le changement climatique.

Si les pays développés ne respectent pas l'engagement de garantir les provisions pour le financement, le transfert de technologies et le développement des capacités, nous ne pourrons pas atteindre nos objectifs. Les pays industrialisés se sont engagés à faire une contribution annuelle de 100.000 millions de dollars pour ce que l'on appelle le financement climatique. Mais en deux ans, il n'y a eu l'assignation que de 10% de cette somme. 

Nous voyons avec une grande préoccupation que l'on envisage de transférer cette responsabilité au secteur privé. C'est une erreur historique gravissime. La privatisation de cette responsabilité apportera des conséquences irréversibles.

Frères et soeurs de la presse,

La privatisation est synonyme de capitalisme. On ne peut pas résoudre, avec plus de capitalisme, la crise provoquée par le capitalisme. Prétendre que ce système résolve la crise du changement climatique, c'est comme prétendre donner la responsabilité au renard de veiller sur le poulailler.

Certaines données nous montrent que, uniquement pour atténuer les effets du changement climatique, on doit investir environ 3% du PIB mondial, ce sont des données des Nations Unies. Le financement pour l'adaptation, l'atténuation, la technologie, les forêts, devrait être de 6% du produit national brut des pays développés.

Lamentablement, on dépense plus pour la guerre que pour combattre le changement climatique et ses conséquences. Un exemple clair de tout cela est ce qui arrive avec le principal pollueur de l'histoire de la planète : Les Etats-Unis. Il abandonne l'accord de Paris, méprise la communauté internationale et sa priorité, c'est la guerre, les interventions. Sa dépense militaire pour 2018 arrivera presque à 700 000 millions de dollars.

En tournant le dos à l'accord de Paris et en utilisant tant de ressources pour la guerre, les Etats-Unis ne sont pas seulement en train de construire des murs physiques entre frères, ils construisent le pire des murs dans le monde entier : le mur entre la vie et la mort, le mur qui peut priver nos générations futures de leur droit à la vie. Les Etats-Unis sont la principale menace contre la famille humaine et contre la Mère Terre.

Frères et Soeurs,
C'est pour toutes ces raisons et beaucoup d'autres que nous suggérons les tâches urgentes suivantes, ce sont nos 10 propositions pour cette conférence :

  1. Reconnaître et respecter les droits de la Mère Terre, son droit à exister et à être respectée intégralement, à maintenir ses cycles vitaux et ses processus évolutifs, à la génération, à la restauration et à la protection de ses structures génétiques.
  2. La création du Tribunal de Justice Climatique, contraignant, pour qu'il juge et sanctionne les responsables du dommage climatique.
  3. Reconnaître et solder la dette climatique historique des pays industrialisés envers la planète à cause de la sur-exploitation des ressources naturelles.
  4. Reconnaître les services basiques comme des droits humains : l'eau et l'énergie ne doivent pas être un commerce privé, mais un service public.
  5. Les ressources de la guerre doivent être re-dirigées et utilisées pour l'atténuation et l'adaptation au changement climatique, elles doivent servir à faire face aux graves conséquences des catastrophes climatiques.
  6. Construire un nouvel ordre économique financier mondial, où les relations soient basées sur la complémentarité et la solidarité, et non sur le profit, l'individualisme et l'exploitation.
  7. La reconnaissance des droits des peuples du monde à accéder à égalité de conditions aux avancées de la science et de la technologie.
  8. Nous devons récupérer les savoirs ancestraux des Peuples indigènes pour vivre en harmonie avec la nature.
  9. Nous devons construire une nouveau paradigme de production, de consommation, de développement et de lien avec la Mère Terre : C'est le "Bien Vivre".
  10. Au niveau politique international, notre devoir est de défendre le multilatéralisme, l'égalité, la souveraineté des Peuples, et notre droit à la Paix, la Paix avec justice sociale, avec la dignité et la souveraineté des peuples.
Frères de la presse,

Le temps s'achève pour nous. Si nous voulons remporter ce défi global, notre lutte doit être contre le capitalisme, contre le colonialisme et contre l'impérialisme. L'être humain ne peut pas vivre sans la Mère Terre mais la Mère Terre peut mieux exister sans l'être humain.

Voici notre proposition pour cette conférence sur la planète convoquée par le président de France.
Merci beaucoup.

Paris 12 décembre 2017
Traduction : CM




L'assistante sociale / La trabajadora social

Elle reçoit dans son bureau le secret des familles et des personnes.
Elle reçoit les larmes et les questions.
Elle reçoit les histoires et les soifs d'avenir.
Elle reçoit la pauvreté crasse et la bêtise,
    la violence et la fragilité,
    la lutte au quotidien et les envies de vivre.
Elle écoute, elle reformule, elle explique, elle oriente.
Elle passe beaucoup de temps à remplir des évaluations et des formulaires, à rechercher dans quelles cases et quels dispositifs pourront se retrouver les personnes qui osent passer sa porte.

Alors que les associations du secteur social sont de plus en plus en difficulté,
alors que les aides individuelles sont de plus en plus limitées,
alors que les politiques publiques cherchent à faire du chiffre tout en réduisant les droits, 
alors que les bénéficiaires de l'aide et de l'action sociale sont de plus en plus considérés comme de dangereux assistés qu'il convient de contrôler,
la demande sociale ne cesse d'augmenter...

Et elle, l'assistante sociale,
est chargée de vider avec une petite cuillère
la mer des besoins qui frappent de plein fouet la société malmenée.
Si elle supporte ce travail de Sisyphe sans tomber dans l'amertume,
si elle est capable de gérer les conflits en désactivant les bombes relationnelles,
si elle va au-delà des pesanteurs institutionnelles et des contradictions des politiques publiques,
si elle cherche toujours à transformer la demande d'aide en possibilité d'autonomisation, 
c'est qu'elle aime les gens.




En su oficina, ella recibe el secreto de las familias y de las personas.
Recibe las lágrimas y las preguntas.
Recibe las historias y la sed de porvenir.
Recibe la pobreza crasa y la estupidez,
    la violencia y la fragilidad,
    la lucha cotidiana y las ganas de vivir.
Escucha, reformula, explica, orienta.
Pasa mucho tiempo rellenando evaluaciones y formularios, buscando los estratagemas y dispositivos donde se podran encarrilar las personas que se atreven a llamar a la puerta.

Cuando las asociaciones del sector social se encuentran cada vez peor,
cuando las ayudas individuales son más y más limitadas,
cuando las politicas públicas entran en las lógicas de cuotas y reducciones de derechos,
cuando los beneficiarios de la acción social son considerados como peligrosos asistidos que es menester controlar, y que la demanda social no para de aumentar...

... Ella, la trabajadora social,
está encargada de achicar con una cucharadita
el mar de necesidades que azotan la sociedad maltratada.
Si aguanta este trabajo de Sísifo sin caer en la amargura, 
si es capaz de gestionar los conflictos desactivando las bombas relacionales,
si soporta la pesadez institucional y las contradicciones de las políticas públicas,
si busca siempre la transformación del pedido de ayuda en posibilidad de empoderamiento, 
es porque quiere a la gente.






La cuisinière de la crèche municipale / La cocinera de la guarderia municipal

Chaque jour de la semaine, elle prépare les repas des tout-petits à la crèche collective. Elle utilise des produits frais en jouant avec les goûts, les textures et les couleurs des aliments. Elle s'adapte aux âges et aux régimes des bébés. Comme elle sait que Lucille est allergique au lactose et qu'Ahmed ne peut pas manger de poisson, elle tient compte de leur régime spécifique.

Tout en respectant des règles d'hygiène strictes, très contrôlées dans ce cadre professionnel, elle assume le rôle capital d'éveiller la curiosité alimentaire des petits de 0 à 3ans en travaillant au plus près des enfants et de ses collègues de la crèche. Elle n'est pas employée par une grande entreprise de restauration collective ou par une cuisine industrielle qui prépare des milliers et des milliers de plats journaliers.

Par sa pratique quotidienne, elle est un bel exemple du caractère qualitatif que doit porter l'intérêt général : A travers elle, le service public donne le meilleur en notre nom à nos enfants en faisant le choix de privilégier une organisation de proximité, de se placer délibérément hors de la concurrence et de ne pas surévaluer les logiques financières.


Cada dia de la semana, ella prepara la comida de los pequeñitos acogidos en la guarderia colectiva. 
Utiliza productos frescos, juega con los sabores, las texturas y los colores de los alimentos, se adapta a las edades y a las dietas de los bebés. Como sabe que Lucila es alérgica a la lactosa y que Ahmed no puede comer pescado, tiene en cuenta sus regímenes específicos.

Respectando estrictamente unas normas de higiene muy controladas en ese marco profesional, ella asume el rol capital de despertar los paladares de los pequeños humanos de 0 a 3 años. No es empleada por una gran empresa de restauración colectiva o una cocina industrial que prepara miles y miles de platos diarios. No. Ella trabaja en su cocina situada en la guarderia y conoce de cerca a los niños y a sus colegas.


En su práctica cotidiana, es un ejemplo bello del carácter cualitativo que conlleva el interés general: a través de la cocinera de la guarderia, el servicio público local quiere dar lo mejor en nuestro nombre a nuestros hijos y a nuestras hijas. Privilegiando la proximidad, se situa deliberadamente fuera de la lógica de la competencia y no sobrevalora los aspectos financieros.



Les employés de l'Etat-Civil / Los empleados del Registro Civil

En France, depuis la Révolution, ce sont les employés de l'Etat Civil qui saisissent et conservent systématiquement les traces de la vie des personnes sur le territoire de la commune, en lieu et place des autorités religieuses qui rédigeaient et conservaient les registres des baptêmes, mariages et sépultures.

En enregistrant les naissances, la filiation, le prénom et le nom, les décès ou les mariages, ces scribes éditeurs de vie identifient les citoyens et citoyennes. Ils inscrivent dans des registres que la vie, la mort et les amours humaines n'ont pas parties liées avec les dieux. Ce faisant, ils font oeuvre laïque : Quand ils ou elles rédigent un acte de naissance, ils sont témoins de la transmission de la vie de génération en génération. Quand ils communiquent les autorisations de fermeture de cercueils ou éditent un acte de décès, ils marquent le caractère éphémère du passage d'un individu sur terre et inscrivent son trépas dans le temps. Quand ils accompagnent les couples pour les mariages, ils et elles contribuent à la socialisation des amours humaines.

Le caractère public et gratuit de tous ces actes est un gage d'accessibilité.
En ces temps de marchandisation du vivant et de la mort : Gardons-nous bien contre la privatisation !

Auparavant écrits en pleins et déliés, tous ces actes sont maintenant digitalisés.
Les registres informatisés ont succédé aux registres en papier.
En ces temps de bataille pour le contrôle de l'information : Veillons à ce que ces bases de données personnelles soient bien protégées !


En Francia, desde la Revolución, son los empleados municipales del Registro Civil quienes escriben y conservan las trazas de la vida de las personas, en lugar de las autoridades religiosas.

Al registrar los nacimientos, la filiación, el nombre y el apellido, los fallecimientos o los matrimonios, esos escribanos editores de vida identifican las ciudadanas y los ciudadanos. Inscriben en unos registros que la vida, la muerte o los amores humanos no estan vinculados a los dioses. Son obreros de la laicidad: cuando redactan una partida de nacimiento, son testigos de que la vida se transmite de generación en generación. Cuando comunican las autorizaciones de cerrar los féretros o editan un certificado de defunción, marcan el carácter efímero del paso de un individuo sobre la tierra e inscriben su muerte en el tiempo. Cuando acompañan las parejas en los matrimonios, contribuyen a la socialización de los amores humanos.



El carácter público y gratuito de todos esos actos es una garantía de accesibilidad.
En esos tiempos de mercantilización de lo vivo y de lo muerto : cuidemonos contra la privatización!

Anteriormente, todos esos actos estaban escritos a trazos finos o trazos gruesos. Ahora son digitalizados. Los registros informatizados han sucedido a los registros de papel.
En esos tiempos de batalla por el control de la información: 
Alerta sobre la protección de esas bases de datos personales!



Le gardien du cimetière / El guardia del cementerio

Le cimetière est un jardin pour les vivants où reposent les morts.
Le gardien du cimetière est jardinier.
Chargé d'ouvrir et fermer la porte, d'accueillir et renseigner les familles endeuillées, d'accompagner les pompes funèbres, il entretient le cimetière, ses allées et ses arbres. Témoin des saisons et du temps qui passe, il reçoit aussi les larmes et le souvenir.
Il cultive et soigne cet espace que les anciens appelaient "sacré",
ce lieu du culte des morts, caractéristique de l'espèce humaine,
lieu éminemment collectif où tous les trépassés sont égaux devant la mort
et tout à la fois, lieu de l'intime où la dernière trace d'histoire individuelle est enfouie sous la terre.
Agent public, il affronte depuis une vingtaine d'années la suppression du monopole communal et le contexte concurrentiel du marché de la mort.




El cementerio es un jardín para los vivos, donde descansan los muertos.

El guardia del cementerio es jardinero.
Encargado de abrir y cerrar la puerta, de acoger e informar a las familias enlutadas, de acompañar a las funerarias, él cuida del cementerio, sus alamedas y sus arboles. Testigo de las estaciones y del paso del tiempo, recibe las lágrimas y los recuerdos.
Cultiva y cuida este espacio que los ancianos llamaban "sagrado",
este lugar de culto a los muertos, característico de la especia humana,
lugar eminentemente colectivo, donde todos los fallecidos son iguales delante la muerte.
Y tambien, lugar de lo íntimo donde la última traza de historia individual está ocultada bajo tierra.
Agente público, enfrenta desde hace unos veinte años la supresión del monopolio municipal y el contexto competitivo del mercado de la muerte.




mardi 26 décembre 2017

Le balayeur / El barrandero

Il passe chaque jour. Avec son chariot, son bras mécanique, son balai et ses sacs poubelles.
Chaque jour. Méthodiquement, patiemment, scrupuleusement.
Il ramasse les papiers gras,
les canettes de bière vides,
les vieux briquets,
les cartons oubliés,
les aliments jetés,
les mégots.
Il ramasse les scories, la matière inutile au rebut.
Chaque jour.
Au soleil ou sous la pluie.
Chaque jour.
Qu'il gèle ou qu'il grêle.
Chaque jour d'automne à ramasser les feuilles rousses et à se battre avec les vents.
Il remplit sa part de la fonction éminemment marchande du traitement des déchets et celle d'occuper humainement l'espace public en tant qu'agent de l'intérêt général. Fonction éminemment volatile.


Pasa cada día. Con su carretilla, su brazo mecánico, su escoba y sus bolsas de basura. 
Cada día. Metódicamente, pacientemente, escrupulosamente. 
 Recoge los papeles grasos, 
 las latas de cerveza vacias, 
 los mecheros usados, 
 los cartones olvidados, 
 los alimentos esparcidos, 
 las colillas. 
 Recoge la escoria, la materia inútil tirada. 
 Cada día. 
Con el sol o con la lluvia. 
 Cada día. Con el hielo y la granizada. 
Cada día. Con las hojas del otoño. Otra materia inútil tirada. 
 En general, pasa desapercido. 
 Solo su ausencia revela su eficacia, 
cuando en los dias de huelga, se acumula públicamente la basura. 
 Cumple su parte de la función eminentemente mercantil del tratamiento de los residuos. 
Pero cumple también una función volátil : 
la de ocupar humanamente el espacio público como agente del interés general.






L'agent d'accueil de la mairie / La recepcionista de la alcaldía

Son sourire appartient au domaine public, c'est un bien commun des habitants.
Elle regarde les gens avec bienveillance. 
Non pas cette bienveillance de façade qui jaillit quelquefois des guichets. 
Non, elle regarde les gens avec une bienveillance profonde, patiente, capable de comprendre avec peu de paroles - et quelque fois, sans parole - ce qui anime les personnes. Et capable de les orienter avec efficacité pour faciliter leurs démarches.
En une heure, quinze personnes sont passées à l'entrée de la mairie : Elle les a saluées aimablement, a souhaité une bonne journée, a donné des tickets et des formulaires, écrit une adresse, conseillé sur la marche à suivre dans le labyrinthe institutionnel. C'est une fonction volatile, dont la valeur ajoutée n'occupe pas d'espace sur les marchés : faciliter l'accès aux droits en saluant tranquillement le passage des heures et des êtres humains n'a pas de prix. 
C'est une relique d'humanité facilitante au milieu de la modernisation administrative.



Su sonrisa es del dominio público, es un bien común de los habitantes.
Mira a la gente con benevolencia, 
no una benevolencia de fachada como brota a veces de las ventanillas, 
sino una benevolencia profunda, paciente, capaz de entender en pocas palabras 
- y de vez en cuando sin palabras - lo que anima a las personas. 
Y capaz de orientarlas eficazmente para facilitar sus trámites. 
En una hora, han pasado unas quince personas por la entrada de la alcaldía: 
les ha saludado amablemente, ha deseado un feliz día, ha entregado tiquetes y formularios, 
ha facilitado una dirección, aconsejado sobre la marcha a seguir en el laberinto institucional... 
Esa es una función volátil, cuyo valor añadido no ocupa espacios mercantiles: facilitar el acceso a los derechos saludando tranquilamente el paso de las horas y de los humanos no tiene precio. 
Es una reliquia de humanidad facilitadora en medio de la modernización administrativa.




mardi 5 décembre 2017

Colombie. Mise en oeuvre des accords : Le verre à moitié vide


Source : VOZ
Hernán Camacho
@camachohernan


La transposition légale des accords de paix se termine au Congrès de la République avec un bilan négatif. Ni la réforme politique pactée à La Havane, ni les réformes constitutionnelles et légales ouvrant la voie à la réforme agraire intégrale n'ont pu passer au travers des quatre débats constitutionnels et elles se trouvent maintenant dans les limbes.

Un an après la signature des accords de paix, les FARC et le Gouvernement national se sont de nouveau rencontrés au théâtre Colón, là où le 24 novembre 2016, Rodrigo Londoño, le chef des FARC-EP et le président Juan Manuel Santos, s'étaient serrés les mains après avoir signé l'accord de paix. Une année plus tard, chacun y a présenté un bilan de ce qui a eu lieu jusqu'à aujourd'hui.

Celui qui ferme les yeux

Selon le président des Colombiens, il a travaillé tout au long de ces mois pour que les accords deviennent une réalité. Il a pourtant expliqué que ce n'est pas tâche facile, que cela prend du temps et que "cela ne se fait pas en un jour". Il a reconnu que des erreurs dans les procédures législatives ont été commises et qu'il y a une forte opposition des forces politiques contraires à la paix.

"Je comprends l'impatience et l'urgence que beaucoup expriment. Nous voudrions tous que les changements et les opportunités de la paix soient déjà une réalité. Je sais aussi qu'il y a eu des retards, des difficultés, des erreurs. Mais nous travaillons sans cesse pour accélérer le pas et avancer. Et pour dire la vérité, nous, les colombiens, avons mieux réussi à poser les bases initiales de la paix que de nombreux autres pays dans des situations similaires" a signalé Juan Manuel Santos.

Les difficultés

Un discours peu critique face aux difficultés les plus pressantes de la mise en oeuvre : La Justice Spéciale pour la Paix suspendue, la réforme politique peu conforme aux accords, des Circonscriptions Spéciales pour la participation politique des victimes qui ne sont pas assurées ; l'assassinat continuel de dirigeant.e.s sociaux, de défenseur.e.s des droits humains, et d'anciens combattants des Farc, ainsi que les retards pris dans la réincorporation sociale et économique des ex-combattants, font que le processus de paix ne soit pas dans ses meilleurs jours.

Timo (le surnom du chef des Farc)

Rodrigo Londoño, au contraire, a été plus critique à propos du moment politique. Il a remercié l'initiative de commémorer l'anniversaire de la signature des accords et il a rappelé que l'aspiration la plus importante était la transformation de la société.

"Nous, les FARC, nous avons demandé pardon au monde pour chacune de nos actions. Nous avons dit adieu aux armes, aux haines et aux désirs de vengeance. Nous avons initié notre plus fervent désir de vivre en paix [...] Une année plus tard, convertis en parti légal et après avoir remis les armes et honorer chacun de nos engagements, nous nous présentons devant la société pour renouveler notre engagement avec la paix et la justice sociale" a indiqué Rodrigo Londoño.

Le chef du nouveau parti a averti qu'ils ne feront marche arrière sur aucune des obligations pactées, et qu'il n'existe aucun autre plan que celui de voir l'accord matérialisé de manière intégrale par l'Etat Colombien. "Nous sommes certains que nous accompagnent des millions de colombiens qui ont cru dans la solution politique au conflit. Nous invitons cette Colombie à rejoindre la lutte pour la mise en oeuvre de l'accord final" a ajouté Londoño.

Les critiques ont aussi été adressées au Congrès de la République qui a joué un rôle néfaste dans la mise en oeuvre de l'accord, en cherchant à tout prix à en changer la nature à travers une stratégie de renégociation. "On se moque du peuple colombien car ces lois de réforme ne respectent pas ce qui a été accordé" a insisté Londoño.

Candidat présidentiel des FARC, il dit que ce même Congrès qui avait entériné l'accord et en avait approuvé les éléments essentiels, semble honteusement déterminé à le réduire en miettes : "C'est une conduite qui avilit l'Etat aux yeux des citoyens d'ici et d'ailleurs. De plus, la Cour constitutionnelle elle-même, qui a ordonné aux pouvoirs publics de respecter ce qui a été signé, se prononce contre les accords. Dans un pays aux montages judiciaires historiques, le Procureur Martínez établit qu'un ex-combattant accusé d'avoir commis le plus petit délit après l'accord, perdrait automatiquement les bénéfices de ce qui a été signé, dont l'extradition".

La Commission de la Vérité

Le président de la Commission de la Vérité récemment élu, le père Francisco de Roux, a dit qu'il se sentait ému et inquiet après avoir écouté les discours de Rodrigo Londoño et du chef d'Etat. Le prêtre jésuite a enjoint les colombiens à assumer la responsabilité d'aller de l'avant avec ce qui a été accordé et de le respecter pour les générations futures.

"La guerre est terminée et nous devons avoir dans le coeur des désirs de paix. Si cette implication de la société civile et la décision de tous en tant que personnes et en tant que colombiens, ne se transforme pas en force significative qui nous permet de porter l'accord à bon port et créer de nouvelles règles pour vivre ensemble, les changements seront impossibles. Ne pensez pas que tout est perdu, nous, nous venons offrir notre coeur" a indiqué le père Francisco de Roux.

La JEP

Par ailleurs, la présidente de la Juridiction Spéciale de Paix, la magistrate Patricia Linares, a souligné que le processus de paix serait plein d'obstacles et de déboires car il se construit sur la méfiance des parties, fruit d'un demi siècle de guerre. La juriste qui représente les 52 magistrats du Tribunal de Paix, objet de toute une série de critiques selon lesquelles ce serait supposément une justice de revanche des FARC, a invité le pays à ne pas disqualifier ses actions avant même que n'ait été proférée la première sentence.

"Peu à peu, le système intégral de justice, vérité et non répétition s'est mis en marche, nous avons tous senti que nous avançons et que s'ouvrent d'autres paradigmes qui trouvent leur place dans ce processus. Les composantes du système avancent vers sa mise en oeuvre. En ce qui concerne la JEP, c'est tous les jours que nous faisons un pas en avant avec les victimes et les organisations de la société, avec le soutien respectueux des parties négociatrices", a souligné Linares.

Pour la magistrate, le système envisagé en Colombie est inédit dans le monde et a été conçu comme une juridiction pour la paix, dont la voie doit chercher à administrer une justice restaurative, qui recompose, qui reconstruit, qui est opportune et qui sera toujours soumise à la Constitution et à la loi. "Nous sommes là pour apporter aux victimes la vérité pour la non-répétition et nous sommes prêts à respecter les garanties de la justice à quiconque se présente, quelque soit sa condition. Nous ne sommes pas un tribunal de vengeance" a conclu Linares.

La Colombie face au monde

L'assesseur juridique de la table des conversations de La Havane, le juriste espagnol Enrique Santiago dit que la Colombie risque de se convertir en pays peu fiable face à la communauté internationale, pour ne pas mener à bien l'accord de paix. "Avec la situation de l'implémentation, nous allons trouver des alternatives à la lumière de la législation colombienne et des lois internationales. Nous allons analyser les scénarios, voir les modifications par rapport à ce qui a été accordé et chercher à revenir sur ces modifications dans la mesure où l'accord est la norme constitutionnelle en Colombie, dans toutes ses institutions. Nous lançons un appel à toutes les institutions co-responsables de la mise en oeuvre pour qu'elles respectent leur mandat" a signalé Enrique Santiago.

A la fin de la journée, des activités culturelles ont eu lieu sur la Place de Bolívar, en attendant des nouvelles de la réunion qui avait lieu à huis clôt entre le chef de la FARC et le Président de la République.

Source : VOZ