jeudi 21 novembre 2019

Bolivie. Des cris de douleur qui s'élèvent dans tout le pays

Miguel Alandia, “Radiodifusión”, 1962, Banco Central de Bolivia, La Paz.

Par Maïté Pinero
Suite aux Reportages de Télé Sur du mercredi 20 novembre.

" Des cris de douleur " qui s'élèvent dans tout le pays accompagnent la " transition démocratique" des putschistes soutenus par l'Organisation des Etats Américains et reconnus par l'Union européenne. Des milliers de paysans venus des vingt provinces du pays ont conflué mercredi à Senkata où l'évacuation de la raffinerie, occupée par les habitants d'El Alto, a causé neuf morts. Ils ont observé une minute de silence et décidé de venir manifester à la Paz ce jeudi 21 novembre. Ils exigent le départ du gouvernement autoproclamé de Jeanine Anez, la libération de tous les emprisonnés et ont voté le maintien du blocage des routes. La pénurie s'installe à La Paz.

Nidia Cruz, la représentante de la défense du peuple, organisme officiel, a confirmé le nombre de morts, ajoutant que ce chiffre n'est pas exhaustif. Les militaires ont emporté de nombreux corps. Il y a aussi de nombreux disparus et détenus. Elle s'est adressée à Jeanne Anez : "Vous êtes femme, vous êtes mère. Les gens pleurent ici, dans la morgue, ils pleurent dans la rue. Les militaires doivent retourner aux casernes. Ces gens ont le droit de manifester pour exprimer leur opinion. Cessez la tuerie". A New York, Stephane Dujarric, le porte parole de l'Onu, dont une commission d'enquête doit arriver lundi en Bolivie, a déclaré que les nouvelles autorités allaient devoir " rendre compte" des morts et blessés.

A La Paz, la place Murillo, siège du Parlement, est encerclée par les tanks. Depuis plusieurs jours, un véritable bras de fer s'y déroule. L'OEA qui a joué un rôle déclencheur dans le coup d'état et l'Union européenne qui a reconnu les putchistes multiplient les pressions pour que de nouvelles élections soient annoncées au plus vite. Il faut donner une façade démocratique au régime fasciste et raciste. 

Dans un autre reportage, on voit le représentant de l'OEA, "ministère des colonies", comme un poisson dans l'eau parmi les putschistes et les militaires, parler de "Pacification, de Droits de l'Homme, de démocratie". Eva Cola, présidente du sénat ( Mas) explique devant la caméra que les députés et sénateurs du Mas "sont au travail pour empêcher le gouvernement Anez de mener à bien ses plans". Sonia Brito, députée du Mas, ajoute: "Ils peuvent nous menacer, nous emprisonner comme ils le font. Rien ne peut empêcher qu'une autre Bolivie soit dans la rue et disent non". Un député de l'opposition avertit en fin de vidéo que de nouvelles élections et la désignation d'un tribunal électoral seront imposés par décret, lundi, si les élus du MAS, majoritaires au Parlement,ne passent pas sous les fourches caudines fascistes, des élections à la pointe des fusils. 

Alors que les ambassadeurs occidentaux sont associés à toutes les négociations, tout comme l'Union Européenne, aucune voix ne s'est élevée en Europe, dans les assemblées pour appuyer les députés du MAS, des élus démocratiquement élus, encerclés par l'armée, soumis à toutes les pressions et qui voient leur peuple massacré. Ils font courageusement face et sont sur leurs bancs. Seule l'Assemblée nationale catalane a dénoncé le coup d'état et la tuerie en cours. Les rares journalistes sur place (ils étaient deux lors du massacre de Senkata et se cachent depuis car l'armée les recherche) signalaient hier l'arrivée de collègues. Il s'agit surtout de photographes qui diffusent les images de femmes en pleurs, de dizaines de milliers de paysans qui confluent vers El Alto, près de La Paz. Combien faudra-t-il encore de morts, de révélations sur le scénario bolivien, pour entrouvrir le rideau de fer médiatique qui participe du putsch ? Encore aujourd'hui, pas un reportage, pas une image, pas une Une sur l'horreur en Bolivie.


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